Le Russe Vladimir Ivanovich Voronkov va diriger le Bureau de lutte antiterroriste à l’ONU. | SAMUEL KUBANI / AFP

Officiellement, la nomination de Vladimir Ivanovich Voronkov, un cador de la diplomatie russe qui était ambassadeur auprès des organisations internationales à Vienne, doit rééquilibrer la faible représentativité de Moscou dans les hautes sphères de l’ONU. Officieusement, les Russes ont imposé d’avoir le poste pour pouvoir réformer l’architecture du contre-terrorisme onusien auquel ils s’étaient pourtant toujours opposés. M. Voronkov prendra la tête du Bureau de lutte antiterroriste, qui a été validé par l’Assemblée générale de l’ONU le 15 juin.

Ce Bureau, doté d’un budget propre de 15 millions de dollars, doit chapeauter les divers organismes créés depuis 2001 pour lutter contre le terrorisme. Il englobera l’équipe spéciale de lutte contre le terrorisme (CTITF) et le Centre des Nations unies pour la lutte contre le terrorisme (UNCCT) – financé par l’Arabie saoudite à hauteur de 110 millions de dollars et dont les travaux restent très opaques. Ces deux entités sont actuellement dirigées par Jehangir Khan, un diplomate pakistanais, qui a aussi été conseiller politique de l’ambassadeur de l’Arabie saoudite auprès des Nations unies, et qui deviendra le numéro deux de M. Voronkov.

« Des garde-fous »

L’agenda du Bureau de lutte antiterroriste devrait reposer sur quatre piliers : la prévention de l’extrémisme violent, le renforcement des capacités des Etats, la coopération et les droits de l’homme. Les diplomates et les ONG ne cachent pas leurs inquiétudes de voir ce dernier sujet délaissé par un directeur russe dont le pays n’est pas connu pour son intérêt pour la question des droits de l’homme. « Certes, il s’agit d’un Russe dont on peut logiquement s’inquiéter des positions sur l’Ukraine, la Tchétchénie, la Syrie ou les droits de l’homme. Mais il aura des garde-fous. Il reste sous l’autorité du secrétaire général de l’ONU », rassure un diplomate.

Cette nomination illustre néanmoins l’incapacité de l’ONU à se considérer comme un acteur majeur de la lutte antiterroriste malgré la promesse d’Antonio Guterres, le secrétaire général, d’en faire « la priorité de l’organisation ». « L’antiterrorisme est une question régalienne que les Etats préfèrent discuter en bilatéral », assure un expert. « Nous avons une vision très différente de la Russie sur ce que représente le terrorisme et sur les réponses qu’il convient d’y apporter. Mais, au moins, c’est une discussion qu’on peut avoir de manière beaucoup plus facile que dans le domaine politique ou celui du maintien de la paix », abonde un haut diplomate occidental.