C’est un hasard du calendrier qui tombe mal : alors qu’il doit être, d’un jour à l’autre, officiellement intronisé patron du Centre national de contre-terrorisme, la « task force » voulue par Emmanuel Macron pour lutter contre l’Etat islamique, Pierre de Bousquet de Florian a été condamné, jeudi 22 juin, à 500 euros d’amende avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir diffamé un imam de Montpellier.

L’ancien préfet de l’Hérault avait assigné à résidence Mohammed Khattabi dans le cadre de l’état d’urgence. Il reprochait à l’imam de tenir des « prêches anti-occidentaux, incitant au jihad et prônant l’usage de la violence ». Dans Le Figaro du 9 décembre, le préfet avait en outre déclaré à propos de M. Khattabi : « Il a des paroles de haine contre notre mode de vie, pouvant être influentes sur les jeunes, il symbolise l’islam dont on ne veut pas dans ce pays ».

M. de Bousquet de Florian se félicitait en outre que la perquisition administrative du domicile de M. Khattabi ait permis, à défaut de révéler une infraction à caractère terroriste, de débusquer « le fraudeur et le tricheur ». L’imam était selon lui coupable d’une « fraude importante aux prestations sociales et familiales (…) il vit en outre avec son épouse, qui touche une allocation de parent isolé ». L’imam a été condamné en mai 2016 à six mois de prison avec sursis pour recel de fraudes aux allocations et « travail dissimulé », mais il a fait appel.

« Mesures injustifiées »

Le tribunal de grande instance de Paris a considéré dans son jugement que les propos tenus par M. de Bousquet de Florian sont diffamatoires. Le préfet n’ayant pas comparu à l’audience du 26 mai, ni fait connaître aucun moyen de défense, il a été condamné, ainsi que l’avait requis le parquet.

Pour l’avocat de M. Khattabi, Me Arié Alimi, « cette condamnation s’inscrit dans le combat de M. Khattabi assigné par erreur et, dans une perspective plus large, de la majorité des assignés à résidence, qui ont subi des mesures injustifiées ». L’imam de Montpellier faisait partie des premiers assignés à résidence de l’état d’urgence. Alors qu’il avait contesté la mesure, son assignation avait été abrogée par le ministère de l’Intérieur le 11 décembre 2015, la veille d’une audience au conseil d’Etat. « Aujourd’hui, l’Etat ne lui reproche aucune dangerosité et encore moins un lien avec le terrorisme », appuie Me Alimi. Et d’ironiser : « Compte tenu de cette diffamation, la nouvelle task force commence un peu difficilement… »