En matière de lutte contre la pollution de l’air, comme dans d’autres domaines, la France ne fait pas partie des meilleurs élèves de la classe européenne. Elle fait l’objet de deux mises en demeure de Bruxelles pour dépassements réguliers des valeurs limites, en particules fines (PM10) et dioxyde d’azote (NO2). Ces excès sont largement dus au trafic routier et contribuent chaque année à 48 000 morts prématurées à l’échelle du pays.

Juste avant de céder les rênes du ministère de la transition écologique à Nicolas Hulot, Ségolène Royal avait publié le décret d’application du Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prépa), qui fixe pour objectif de diminuer drastiquement d’ici à 2030 les rejets des principaux polluants (- 57 % pour les PM10 et - 69 % pour les NO2 par rapport aux niveaux de 2005).

Pour les agglomérations de plus de 250 000 habitants et toujours « pour répondre aux normes européennes », l’Etat élabore par ailleurs depuis 2006 un Plan de protection de l’atmosphère (PPA). Selon nos informations, la région Ile-de-France s’apprête, vendredi 7 juillet, à voter un avis défavorable sur le plan qui doit entrer en vigueur en 2018 pour une durée de cinq ans. Actuellement soumis à la consultation des collectivités, le projet de nouveau PPA doit ensuite faire l’objet d’une enquête publique, avant une adoption définitive prévue fin 2017 ou début 2018.

« Les objectifs sont bons mais le contenu n’est pas à la hauteur des enjeux, et les moyens sont très insuffisants, déclare au Monde la présidente (LR) de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse. L’Etat renvoie la plupart des mesures vers les collectivités locales sans prévoir d’accompagnement. »

Pécresse : « les plus modestes vont être pénalisés »

Le nouveau PPA prévoit d’élargir la zone de circulation restreinte (ZCR), qui concerne aujourd’hui seulement Paris, à toute la métropole, à l’intérieur d’une zone délimitée par l’A86. Depuis le 1er juillet, les véhicules diesel immatriculés avant le 1er janvier 2001 (vignette Crit’Air 5) n’ont plus le droit de rouler en semaine dans la capitale entre 8 heures et 20 heures, comme c’était déjà le cas depuis un an pour tous les véhicules mis en circulation avant le 1er janvier 1997.

« De nombreux Franciliens vont devoir changer de voiture, et ce sont les plus modestes qui vont être pénalisés », déplore Valérie Pécresse. La présidente de la région Ile-de-France estime que le « coût annuel de 9 millions d’euros » retenu dans le PPA est « en dessous de la réalité », et appelle à « un effort massif de l’Etat » pour le remplacement des vieux véhicules diesel et essence.

Dans le « plan climat » qu’il a présenté jeudi 6 juillet, Nicolas Hulot a annoncé, sans en préciser le montant, une « prime de transition » pour le remplacement d’une voiture essence d’avant 1997 ou diesel d’avant 2001. Depuis la loi de transition énergétique de 2015, l’Etat accorde une prime allant jusqu’à 10 000 euros pour l’achat d’un véhicule hybride (6 500 euros pour un hybride rechargeable) en remplacement d’un diesel. En 2015, on recensait 25 000 véhicules électriques en Ile-de-France, soit 30 % des immatriculations en France. Très loin de l’objectif fixé par le PPA de 400 000 véhicules électriques ou hybrides rechargeables en 2020.

Aide de 6 000 euros pour les artisans

Pour Valérie Pécresse, qui s’oppose à la fermeture à la circulation des voies sur berges de la Seine expérimentée par la Mairie de Paris au motif qu’elle « déplace mais ne règle pas le problème de la pollution », seules des « incitations au changement de voiture » sont efficaces.

La région doit adopter, vendredi 7 juillet, un nouveau dispositif pour « inciter » les artisans et commerçants à acheter des véhicules propres. Une aide de 6 000 euros (contre 3 000 euros jusqu’ici) sera accordée pour un véhicule utilitaire léger, et jusqu’à 9 000 euros pour un utilitaire de plus de 3,5 tonnes. Initialement destinée aux entreprises de moins de cinq salariés, elle sera élargie à celles de moins de 50 salariés, soit « la quasi-totalité des artisans d’Ile-de-France », indique Valérie Pécresse, qui oublie de préciser que le dispositif précédent n’avait bénéficié à aucun artisan. Le fait que l’aide sera désormais cumulable avec celle de l’Etat fait croire à la présidente de région qu’elle sera bien plus incitative.

« Il faut agir sur tous les leviers pour redonner de l’ambition à ce plan », estime l’élue LR, qui égraine d’autres mesures comme la « “dédieselisation des bus d’ici à 2025 » ou l’ouverture prochaine de « 10 000 places de parking-relais » aux portes de Paris. Valérie Pécresse a aussi « entendu qu’Elisabeth Borne [ministre chargée des transports] était favorable à une taxe sur les poids lourds. L’Ile-de-France est candidate à l’expérimentation d’un péage aux portes de la région ! »