Le chanteur français Manu Chao fait partie des têtes d’affiche du festival El Clandestino, prévu les 15 et 16 juillet , près de Guéret dans la Creuse. | BERTRAND LANGLOIS / AFP

Depuis deux jours, l’organisation du festival El Clandestino ne dort plus tranquillement. Manu Chao, Keny Arkana, Chinese Man ou encore Morcheeba seront les têtes d’affiche de la première édition qui se tiendra aux environs de Guéret (Creuse) les 15 et 16 juillet. A quelques dizaines de kilomètres se situe la ferme « dite des mille veaux » contre laquelle lutte l’association L-PEA (Lumière sur les Pratiques d’Elevage et d’Abattage). Invitée à s’exprimer pendant le concert de Manu Chao, mobilisé pour cette cause, elle a finalement décliné après avoir reçu des menaces de deux syndicats : les Jeunes Agriculteurs de la Creuse et la FDSEA. Des deux côtés, les accusations de mensonge et d’hypocrisie fusent par communiqués de presse interposés.

Dans un premier temps, les deux organisations ont exprimé leur intention de « menacer la bonne organisation du concert » si l’invitation était maintenue. « On prévoyait de bloquer l’accès au festival », confirme Jean-Marie Colon, président des Jeunes Agriculteurs de la Creuse. Depuis deux semaines, les rumeurs allaient bon train à Guéret sur l’intervention possible des éleveurs, mais Aurore Lenoir, présidente de la L-PEA, ne voulait pas y croire jusqu’à ce que les menaces soient formalisées. « On connaît leur fonctionnement. Ils ont déjà incendié un panneau de signalisation à côté de chez moi. Ils ne sont jamais sanctionnés. On a pris les menaces très au sérieux, on a décidé de décliner l’invitation.»

A la suite de la décision de la L-PEA, les menaces ont été retirées. Dans un second communiqué, les agriculteurs proposent une « rencontre » à Manu Chao pour lui « expliquer le véritable projet de la ferme » et lui faire « visiter une exploitation agricole creusoise ». « On va lui montrer ce que c’est vraiment l’élevage, la première ressource économique de la région », ajoute Jean-Marie Colon avant de préciser que « l’organisation du festival n’apprécie pas trop la L-PEA, ce sont des extrémistes qui veulent que tout le monde arrête de manger de la viande […], ils se font passer pour des victimes.» Une déclaration démentie par les principaux intéressés, contactés par téléphone.

La L-PEA, maître de sa décision

Contrairement à ce que déclare le syndicat dans son communiqué, l’équipe d’El Clandestino n’est pas à l’origine du retrait de l’association. Cette décision a été prise par Aurore Lenoir. « Nous étions en contact mais nous n’avons pas à prendre parti, précise l’organisation du festival. On pensait pouvoir réfléchir sur des sujets de société en marge des concerts, ça ne sera pas le cas […]. De plus, contrairement à ce qu’ont dit les syndicats, ce n’est pas l’argent public qui a été utilisé pour inviter l’association : nous n’avons reçu aucune subvention, comme c’est le cas des premières éditions de beaucoup de festivals ».

El Clandestino était pourtant une opportunité pour la L-PEA, plus habituée à recevoir des soutiens de personnes publiques qu’à s’exprimer devant des milliers de personnes lors d’une manifestation culturelle. « Quand j’ai vu que Manu Chao passait dans la Creuse, je lui ai proposé plusieurs opérations. Il nous a invités à nous exprimer publiquement, raconte Aurore Lenoir.   « Comme il invite régulièrement des tas d’autres associations », précise l’organisation du festival.

« On pensait parler groupes, musique et fête, mais c’est raté », se désole l’organisation du festival, qui revendique cependant l’engagement de sa programmation et annonce la tenue d’un « village solidaire » parallèlement aux concerts.