Le président de la République française, Emmanuel Macron, était à Lausanne, le 11 juillet pour soutenir la candidature de Paris avant la décision du CIO sur la double attributionn. (Jean-Christophe Bott/Keystone via AP) | Jean-Christophe Bott / AP

On n’a vu que lui, ou presque. Arrivé lundi 10 juillet en milieu de journée, reparti dès le lendemain après-midi, Emmanuel Macron ne sera resté qu’une nuit au Beau-Rivage Palace de Lausanne, avec sa perspective imprenable sur le lac Léman. Mais durant son court séjour vaudois, le président de la République, escorté d’un lourd dispositif sécuritaire, aura aimanté l’attention médiatique. Tony Estanguet, le coprésident de la candidature française, et Anne Hidalgo, la maire de Paris, deux acteurs pourtant majeurs de la délégation tricolore, ont dû faire avec.

Lundi, les journaux locaux ont titré en  « une » sur le nouveau chef d’Etat plus que sur l’enjeu sportif. Le patron du Comité international olympique (CIO), l’Allemand Thomas Bach, a résumé la situation d’un jeu de mots, dans l’une des pièces du Musée olympique qu’il venait de faire visiter à son hôte : « La candidature de Paris 2024 est en marche. » Les deux hommes se sont ensuite donné une longue accolade sous le crépitement des appareils photo.

« L’argument “président de la République” est précieux, mais à utiliser avec parcimonie », nuance un membre de la délégation française

Si M. Macron a salué un projet porté par « une équipe de France remarquablement unie », il n’a pas rechigné à l’incarner personnellement. « Je viens pour porter une candidature construite avec beaucoup d’ardeur », a-t-il déclaré, quelques minutes après avoir posé avec M. Bach près de la statue du baron Pierre de Coubertin. L’usage répété de la première personne du singulier n’a pas échappé aux membres de la délégation française, dont l’un a jugé qu’il était « un peu audacieux ».

Un pin’s de Paris 2024 accroché sur sa veste bleu marine, M. Macron a resitué la course aux Jeux dans le contexte international. Certes, il n’a fait aucune allusion directe à Donald Trump, absent en Suisse – son homologue américain avait accueilli Thomas Bach à la Maison Blanche fin juin. Mais le président français a souligné le « besoin de multilatéralisme » et de « ces valeurs de paix, de liberté, de tolérance que le mouvement olympique illustre, incarne formidablement ». « C’est cela que je suis venu défendre », a-t-il déclaré.

Les autres n’ont pas eu beaucoup de temps de parole

Mardi matin, il a été l’un des sept soutiens de la candidature parisienne à s’exprimer devant les membres du CIO, à huis clos. Quelques minutes plus tard, en conférence de presse, les questions des journalistes ont toutes été adressées au chef de l’Etat, alors qu’ils étaient huit sur l’estrade. Seuls Tony Estanguet et Anne Hidalgo – qui a pris la parole de son propre chef, à deux reprises – ont aussi bénéficié d’un peu de temps de parole.

Présentée comme un atout dans la course olympique, la présence présidentielle peut-elle aider à faire pencher la balance du côté de Paris ? « Aucun pays, sauf les Etats-Unis, ne peut organiser un événement comme les Jeux sans l’appui du gouvernement. Le fait que le chef de l’Etat vienne ici, c’est une garantie très importante », estime Franco Carraro, membre du CIO depuis 1982. Le vénérable Italien, qui se dit favorable à un scénario Paris 2024-Los Angeles 2028, a apprécié le fait que M. Macron ait parlé « en français et aussi en anglais ».

Emmanuel Macron, le président français, entouré d’Anne Hidalgo ( à gauche) et de Tonny Estanguet ( à droite), à Lausanne,  le 11 juillet. REUTERS/Pierre Albouy | PIERRE ALBOUY / REUTERS

« L’argument “président de la République” est précieux, mais à utiliser avec parcimonie », nuance un membre de la délégation française. Par le passé, la présence des chefs d’Etat ou de gouvernement a eu des effets inégaux. Le rôle de Tony Blair, qui avait rencontré les membres du CIO en 2005 à Singapour et réussi à faire pencher la balance en faveur de Londres, a souvent été pris comme un modèle de lobbying. A l’époque, il avait souligné en creux l’échec de Jacques Chirac, lui aussi venu en Asie mais sans prendre le temps de rencontrer individuellement les membres votants de l’institution.

En 2009, la visite express de Barack Obama afin de soutenir la candidature de Chicago 2016 n’avait pas suffi à l’emporter face à Rio. Pire : Chicago avait été éliminé en premier, et les perturbations créées par la présence du président américain auraient même agacé certains membres du CIO.