C’est l’une des idées du gouvernement pour rendre plus flexible le contrat de travail : promouvoir les contrats à mission spécifique. Autant dire qu’elle n’est pas neuve. Depuis trente ans, de nombreux gouvernements ont cherché à promouvoir ce contrat à mi-chemin entre le contrat à durée indéterminée (CDI) et le contrat à durée déterminée (CDD).

Ce contrat de mission, à durée indéterminée, mais limité dans le temps à la réalisation d’un projet, est directement inspiré du CDI chantier (CDIC) mis en place au début des années 1970 par le bâtiment et les travaux publics (BTP). Pour autant, ce secteur utilise-t-il massivement ces contrats moins rigides que le CDD ?

« Il y recourt lorsqu’il n’a pas le personnel suffisant en interne, pour mener à bien un chantier. C’est un outil auquel les entreprises sont très attachées. Les PME comme les grands groupes l’utilisent de façon assez importante », explique-t-on à la Fédération nationale des travaux publics (FNTP). « Aujourd’hui, ces contrats ne sont pas la norme dans les entreprises, même s’il n’existe aucune statistique officielle », précise-t-on à la Fédération française du bâtiment (FFB).

« Le CDI chantier est utilisé notamment pour les grands chantiers en France, indique-t-on dans une grande entreprise. Il permet de recourir sur le temps long aux compétences locales pour répondre aux besoins ponctuels de ces projets sur toute la durée d’un chantier sans date de fin préalablement définie. » « Le CDIC est plus sécurisant qu’un contrat d’intérim et cela permet à ces collaborateurs de bénéficier de tous les avantages des salariés en CDI, comme l’épargne salariale, la participation, la formation ou la mutuelle », remarque-t-on dans un autre groupe.

« clauses d’insertion sociale »

Les projets de ligne à grande vitesse (LGV), de centrale nucléaire ou de ligne du Grand Paris Express y ont ainsi massivement recours. Un simple coup d’œil sur les offres d’emploi du secteur le démontre. Des ingénieurs sont ainsi actuellement recherchés pour les chantiers du Grand Paris.

Pour la construction du TGV Est, jusqu’à 15 % de la main-d’œuvre (environ 6 000 personnes) disposait d’un tel contrat en 2006, selon l’Observatoire socio-économique du projet. Ces contrats étaient en particulier attribués aux compagnons recrutés localement. Pour le prolongement de la LGV vers Rennes, la moitié des 1 500 salariés locaux étaient titulaires d’un CDIC.

Enfin, sur la LGV Sud Europe Atlantique (SEA, entre Tours et Bordeaux), qui vient d’entrer en service, l’Observatoire socio-économique du projet estimait que les quelque 1 500 salariés locaux étaient titulaires d’un tel contrat sur l’année 2013, alors que les compagnons « déplacés » sur le chantier disposent principalement de CDI. « Ceci peut s’expliquer par le fait que les déplacés sont le plus souvent des salariés permanents de l’entreprise tandis que les locaux ont été recrutés spécifiquement pour le projet », indique l’Observatoire.

Ce contrat de mission permet souvent aux groupes de BTP de respecter les « clauses d’insertion sociale » liées au financement du projet. Cela ne veut pas dire que tous finissent au chômage, une fois le chantier terminé. L’employeur a en effet l’obligation de chercher un emploi sur un autre chantier. Si le salarié est licencié, sans obtenir de prime de précarité, il bénéficie pendant un an d’une priorité pour être réembauché.