Ne rien cacher, mettre les choses à plat, croire aux énergies renouvelables, privilégier le dialogue au mépris : tels sont les leitmotivs affirmés par le ministre de la transition énergétique, Nicolas Hulot, dans un entretien à paraître dimanche 16 juillet dans Ouest-France.

Dans cette interview, l’ancien animateur de télévision en appelle à EDF pour accompagner la révolution énergétique en cours. « Il faut absolument qu’elle accélère son évolution, et qu’elle prenne en compte le fait que le modèle énergétique de demain sera beaucoup plus diversifié », dit-il, déplorant notamment le retard pris dans la construction de l’EPR de Flamanville (Seine-Maritime). « Il faut avoir une foi absolue dans les énergies renouvelables. »

Pour développer ces dernières, le ministre évoque les « leviers fiscaux ». « Il faut par exemple introduire des avantages compétitifs à l’économie décarbonée. Il faut aussi simplifier les procédures d’appels d’offres et raccourcir les durées des contentieux. »

Ne pas sacrifier l’emploi

Interrogé sur l’objectif, inscrit dans la loi, de faire passer la part de l’énergie nucléaire de 75% à 50% dans le bouquet énergétique français, Nicolas Hulot évoque « un véritable défi, qui peut sembler insurmontable ». « Il va falloir définir des scénarios réalistes et possibles, sinon ce sera brutal. Mais je ne veux rien cacher », dit-il.

Il précise n’avoir « pas dit qu’il fallait fermer 17 réacteurs » sur la cinquantaine actuellement en service mais « rappelé que, pour appliquer la loi, certains scénarios prévoient qu’on en ferme 17, voire plus. Or jusque-là tout le monde a fermé les yeux là-dessus ».

« J’ai bien récupéré une loi mais aussi un manque de stratégie. Il faut remettre les choses à plat, pour ramener réellement la part du nucléaire à 50% », ajoute-t-il, soucieux d’« engager des trajectoires planifiées et notamment sur un plan social et économique ».

« On ne peut fermer des centrales sans prendre en compte la réalité des emplois. Nous devons modéliser les scénarios et construire ces trajectoires de transition. »

Pas convaincu par « l’utilité du projet NDDL »

Concernant le projet d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure, dans la Meuse, le ministre refuse de « se précipiter ». « Mon travail est de vérifier que leur stockage se fasse dans des conditions de sécurité absolue », dit-il. « Ensuite, cela doit nous pousser encore plus à réfléchir sur le nucléaire. Ce n’est pas ma conception d’une civilisation d’avoir des déchets que l’on délègue aux générations futures. »

Interrogé sur le sort du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il rappelle qu’il n’a « jamais été convaincu par l’utilité du projet. Maintenant, le dossier est dans les mains des médiateurs (...) La décision se fera de façon impartiale ». Pour lui, « il y a des besoins avérés pour absorber le trafic mais on a été au plus facile, tout n’a pas été étudié. C’est l’héritage d’une décision prise il y a 30 ans. On s’est dit : il y a des champs de libres, allez hop on bétonne tout ça. Ce sont des logiques dépassées », souligne-t-il.

Pour raisons financières, « le président nous a demandé de suspendre tous les grands chantiers pour les évaluer dans le détail », observe-t-il aussi.

En colère contre Donald Trump

Nicolas Hulot confirme enfin que la conférence sur le climat annoncée par Emmanuel Macron pour le 12 décembre prochain aura pour thèmes principaux la question des financements et l’aide aux pays victimes du changement climatique. L’urgence est selon lui de « mettre en place des mécanismes efficaces et pallier la perte des aides financières qui ne viendront plus des États-Unis », qui se sont retirés de l’accord de Paris sur le climat.

En « colère » depuis la décision de Donald Trump, Nicolas Hulot juge cependant « pertinent » de tenter de remettre le président américain « dans le jeu » des discussions, comme le président Emmanuel Macron s’y emploie.

« Je sais ce qu’elle implique pour ceux qui subissent les conséquences du changement climatique. Ce message qui leur est envoyé est un immense bras d’honneur. » 

« Une fois qu’on a dit ça, je partage avec Emmanuel Macron une réalité : si l’on ne discute qu’avec les gens avec lesquels on est d’accord, les choses n’avancent pas », estime le ministre, assis à quelques mètres du locataire de la Maison Blanche lors du défilé du 14-juillet. « J’étais un peu surpris au début que le président l’invite. De façon un peu primaire, j’avais plutôt envie de l’écarter; mais c’est beaucoup plus pertinent de le remettre dans le jeu », ajoute-t-il, se disant quoi qu’il en soit « confiant » pour la suite du combat climatique, une « dynamique irréversible ».