A Bruxelles, le 17 juillet. | YVES HERMAN / REUTERS

Drôle d’ambiance à Bruxelles pour la deuxième session de négociations sur le Brexit, qui a commencé lundi 17 juillet et doit se prolonger jusqu’à jeudi 20 juillet dans l’après-midi. C’est en réalité la première vraie séance de discussions entre les équipes de Michel Barnier et celles de son alter ego britannique, David Davis. La précédente, en juin, n’a été qu’un tour de chauffe pour montrer aux médias que malgré la confusion politique au Royaume-Uni, le calendrier du divorce avec le reste de l’Union européenne (UE) était maintenu.

En dépit des premiers échanges de « positions » entre Londres et Bruxelles – sur le sort des citoyens européens après le Brexit et sur l’avenir d’Euratom, la communauté européenne de l’énergie atomique –, les pourpalers ne sont pas encore entrées dans le vif du sujet, estiment les Européens. Eux voudraient aborder dès à présent les « obligations financières » de Londres liées au divorce. Et espéraient que M. Davis viendrait lundi avec sa proposition, ce que le conservateur britannique s’est bien gardé de faire.

La Commission européenne estime qu’avant de se retirer, au plus tard, théoriquement, le 31 mars 2019, le Royaume-Uni doit s’acquitter des engagements financiers pris dans le cadre du budget de l’UE: le pays y contribue à hauteur de 15 % par an et le budget communautaire est constitué de crédits d’engagements dont les paiements s’étalent en moyenne sur trois ans. Bruxelles réclame aussi que Londres tienne ses promesses et paie sa part au capital de la Banque européenne d’investissement ou continue d’assurer une partie des pensions des fonctionnaires européens. En tout, les équipes de M. Barnier tablent sur un chèque compris entre 50 et 60 milliards d’euros, même si aucun chiffre n’a été officialisé.

Les points sur les « i »

Répondant à une nouvelle provocation du ministre britannique des affaires étrangères, Boris Johnson, qui avait lancé la veille que l’UE « pouvait toujours courir » pour recevoir son argent, Michel Barnier avait mis les points sur les « i », mercredi 12 juillet. Le Français avait assuré qu’il « ne s’agit sûrement pas d’une punition ou d’une revanche, mais tout simplement de solder les comptes » et que « Londres ne paiera pas un euro de plus que nécessaire ».

Les Européens savent à quel point il est compliqué pour Theresa May d’aborder franchement ce sujet des contributions financières, si délicat pour les « Brexiters ». La première ministre britannique est si affaiblie qu’elle ne parvient plus à contenir les rumeurs sur son éventuel remplacement. Pour autant, Bruxelles se méfie aussi d’une possible position tactique de Londres qui consisterait à « jouer la montre », pour réduire au maximum la facture. Voire, pour ne payer que dans le cadre des « accords de transition » que le gouvernement May a dit vouloir négocier avec l’UE, afin de continuer à ménager au pays un accès au marché intérieur européen à partir du jour du divorce, le temps que la « nouvelle relation » avec l’Union soit négociée.

« L’heure tourne »

Pour l’instant, la Commission (qui négocie pour le compte des 27 autres Etats membres de l’UE) s’en tient à cette position : elle n’abordera la discussion sur la période de transition et la « nouvelle relation » avec Londres qu’une fois que des « progrès suffisants » sur les engagements financiers auront été constatés.

Mais si les 27 ont conscience d’être en position de force, à Bruxelles, on s’inquiète : l’objectif d’avoir pu constater des « progrès suffisants » dans les discussions en octobre paraît de plus en plus ambitieux. En l’absence probable d’avancée importante d’ici à jeudi, la Commission se tient prête pour un troisième « round » de discussions en plein mois d’août. Sans trop y croire, cependant.

« L’heure tourne », ne cesse de répéter M. Barnier, qui ne veut absolument pas parier, contrairement à Mme May pendant la récente campagne électorale britannique, sur un « no deal » le 31 mars 2019 - la fin des négociations, deux ans après l’activation de la demande de sortie. Le négociateur en chef à Bruxelles est trop conscient qu’un divorce brutal aurait des conséquences économiques très dommageables. Surtout pour le Royaume-Uni, mais aussi pour le reste de l’UE.