L’aéroport de Pyongyang, en avril 2017. | ED JONES / AFP

Les Etats-Unis prévoient d’interdire à leurs ressortissants de se rendre en Corée du Nord en visite touristique, selon deux agences y organisant des séjours. Cette mesure est une nouvelle illustration de la montée des tensions entre l’administration Trump et le régime nord-coréen, qui dit avoir réalisé le 4 juillet son premier tir de missile de portée intercontinentale.

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) avait transféré, le 13 juin, un étudiant américain dans le coma, Otto Warmbier, arrêté 17 mois plus tôt pour avoir tenté, ivre, de dérober une banderole de propagande dans un hôtel de Pyongyang et condamné à quinze ans de travaux forcés. Il était décédé une semaine plus tard sur le sol américain.

La Corée du Nord soutient que le jeune homme était atteint de botulisme et ne s’est jamais réveillé après avoir pris un somnifère, une version contredite par des médecins américains. Le père de l’étudiant, Fred Warmbier, accuse le régime d’avoir « terrorisé et brutalisé son fils ».

Une interdiction en vigueur le 27 juillet

L’agence qui l’avait fait entrer dans le pays, Young Pioneers Tours, compte parmi la poignée d’organisations qui organisent des séjours touristiques dans le pays, l’un des plus fermés de la planète. Elle dit avoir été informée vendredi 21 juillet de la prochaine interdiction de séjour en Corée du Nord pour les citoyens américains. La mesure entrera en vigueur le 27 juillet, avec une période de tolérance d’un mois, après laquelle les Américains se rendant en RPDC risquent de voir leur passeport invalidé.

Une agence concurrente, Koryo Tours, le leader sur ce marché touristique de niche, confirme avoir reçu la même information de la part de l’ambassade de Suède en RPDC. Celle-ci représente les intérêts américains à Pyongyang, les Etats-Unis n’ayant pas de relations diplomatiques formelles avec la Corée du Nord.

Environ 100 000 touristes se seraient rendus en Corée du Nord en 2016, dont 95 % de Chinois, souvent curieux de découvrir ce voisin étrange qui n’est pas sans leur rappeler l’époque maoïste. Mais le marché s’est ouvert progressivement aux Occidentaux ces dernières années. Le gouvernement désireux de profiter de cette manne leur ouvre un nombre croissant d’activités, de la partie nord de la zone démilitarisée divisant la péninsule au marathon de Pyongyang en passant par la station de sports d’hiver de Masikryong.

Trois Américains détenus en Corée du Nord

Les touristes optant pour cette destination sont informés en amont des attitudes à éviter, notamment la critique des dirigeants. Ils sont par ailleurs invités à ne pas emporter de Bible avec eux, car le régime est particulièrement inquiet de la venue d’évangélisateurs. Trois Américains restent détenus en Corée du Nord, mais aucun n’était venu faire du tourisme : deux avaient enseigné à l’université des sciences et technologies de Pyongyang et le troisième est un homme d’affaires accusé d’espionnage.

Environ 800 touristes américains se sont rendus en Corée du Nord l’an dernier, selon Simon Cockerell, directeur général de Koryo Tours, qui dit avoir emmené 40 % d’entre eux. Les partisans de ce tourisme considèrent qu’il contribue à changer la vision formatée par la propagande qu’ont les Nord-Coréens des étrangers. « C’est une petite industrie, mais grâce à laquelle quelques personnes sont un peu plus au courant du monde extérieur, elles savent que les étrangers ne sont pas nécessairement comme les médias d’Etat les représentent », souligne M. Cockerell. Mais pour ses détracteurs, ce tourisme fait entrer des devises dans les caisses du régime à un moment où Washington veut bloquer ses sources de financement et expose les ressortissants américains au risque d’être pris en otage comme levier de négociation.