Des collines en feu au-dessus de la plage de Bormes-les-Mimosas, dans le Var, le 26 juillet 2017. | JEAN-PAUL PELISSIER / REUTERS

« Dans la voiture, j’essayais de ne pas regarder, mais je gardais l’image dans ma tête» Vanina, 10 ans, a eu « très peur » quand les flammes se sont approchées dangereusement du centre de vacances de La Manne, près de Bormes-les-Mimosas, dans le Var. Sa mère, Karine Dolczewski, fait défiler les photos sur son smartphone : « Le ciel était tout rouge. C’était un brasier impressionnant avec des flammes immenses qui venaient de partout. »

« Vers 22 h 30, après le spectacle organisé par le centre, on a entendu trois explosions, des bonbonnes de gaz dans le camping d’à-côté, poursuit cette mère de quatre enfants originaire de Noyelles-sur-Lens (Pas-de-Calais). On nous a rassemblés dans l’amphithéâtre pour nous dire qu’il fallait évacuer les lieux. On a tout laissé sur place à part les couches et le biberon pour notre bébé. » Ils sont ensuite descendus en file indienne, « dans le calme » jusqu’à la plage, avant d’être orientés aux alentours de 1 h 30 vers la salle des fêtes de Bormes-les-Mimosas.

« Elle a fait des dessins, mais pas de scène de feu »

Environ 12 000 personnes, selon les chiffres communiqués au Monde par la mairie, ont été évacuées de plusieurs campings et centres de vacances à proximité des foyers qui embrasent toujours les massifs entre La Londe-les-Maures et Bormes-les-Mimosas. Elles ont été réparties au petit matin entre la salle des fêtes, le gymnase, l’école de voile et le collège.

« Avec le bébé, on n’a pas dormi de la nuit », raconte Karine Dolczewski. Elle n’attend qu’une chose : regagner le centre de vacances pour récupérer ses affaires. Malgré les quelques lits de camps installés dans la salle des fêtes, peu de personnes ont pu fermer l’œil et certaines essaient de se reposer tant bien que mal à l’abri de la chaleur.

Johannes et Amélie Kettering, un jeune couple d’Allemands de Francfort, ne sont arrivés à la salle des fêtes qu’à 5 heures, évacués deux heures plus tôt du camping Camp du domaine. « Tout le camping a été évacué en bus vers la plage », raconte M. Kettering, qui juge que « tout était très bien organisé ». Juna, leur fille de 6 ans, a eu « ein bissien angst » (« un peu peur »). « Ce matin, elle a fait des dessins, mais pas de scène de feu », précise sa maman, rassurée.

Ce n’est pas le cas de tout le monde, note Bruno Gebhart, responsable logistique de la protection civile du Var qui a déployé une trentaine de personnes sur zone. « Nous avons installé une cellule psychologique pour faire face au nombreux cas de stress, explique-t-il. On va assister les gens jusqu’au bout, c’est-à-dire aussi longtemps que possible. » Tous espèrent pouvoir regagner leur camping ou centre de vacances dès ce soir. Mais certains pensent surtout à rentrer chez eux.

« Personne ne nous a prévenus qu’il fallait évacuer »

« On est en vie, il faut relativiser. Ça aurait pu être dramatique, car il n’y avait qu’une petite route pour évacuer », dit Bérénice Conrad, qui n’en revient toujours pas d’avoir vu fumer un homme à une heure du matin au bord de la route, après avoir été évacuée de son centre de vacances. « Il y a un manque de prévention », juge cette vacancière qui ne pense désormais qu’à « regagner [sa] verte Haute-Marne ».

Le maire de Bormes-les-Mimosas, François Arizzi, a « bon espoir » que les vacanciers pourront rejoindre leur campement dans la soirée, si la situation sur le front des incendies s’améliore. Il est venu leur dire à la salle des fêtes, juste avant la livraison des sandwichs et des pastèques.

Un homme, assis au fond de la salle, apostrophe l’édile : « On nous a oubliés avec ma fille, explique Philippe Lorielle, de Fontainebleau (Seine-et-Marne). Personne ne nous a prévenus qu’il fallait évacuer le camping. C’est un coup de fil d’une amie qui s’inquiétait de ne pas nous voir qui m’a réveillé à 7 h 30 ce matin. » Et de faire une proposition au maire si le feu menace toujours le site dans la soirée : « Vous connaissez l’émission de télé “J’irai dormir chez vous” ? »

A la vue des gros panaches noirs de fumée visible depuis la salle des fêtes, les agents de la protection civile sont beaucoup moins optimistes que le maire et recensent les personnes qui prévoient de partir afin de préparer les lits et les sandwichs pour ce soir. Et le responsable d’alerter : « Des gens s’amusent à dire qu’il est possible de regagner les campings. C’est totalement faux. »