La garde des Sceaux Nicole Belloudet pendant les débats à l’Assemblée nationale. | FRANCOIS GUILLOT / AFP

C’était l’une des promesses du candidat Emmanuel Macron au cours d’une campagne marquée par les affaires. Après une semaine chaotique marquée par quasiment 50 heures de débat et l’examen de plus de 800 amendements, les députés ont adopté dans la nuit du vendredi 28 au samedi 29 juillet le projet de loi ordinaire visant à restaurer « la confiance dans la vie politique » par 319 voix contre 4, puis le projet organique, avec 203 voix contre 37.

Préparée par l’ex-garde des Sceaux François Bayrou, justement contraint de quitter le gouvernement par l’affaire des collaborateurs d’eurodéputés Modem, la panoplie des mesures est vaste : interdiction des emplois familiaux, inégibilité (en cas de crimes ou d’infractions traduisant un manquement à la probité), conflit d’intérêt (les parlementaires ne pourront plus exercer des fonctions de conseil en cours de mandat), remplacement de l’indemnité représentative de frais de mandat par un nouveau système de prise en charge des frais, retour du « verrou de Bercy » qui donne au ministère de l’économie le monopole des poursuites pénales en matière de fraude fiscale.

Fin de la réserve parlementaire

La suppression de la réserve parlementaire a été entérinée, non sans opposition. Souvent critiquée comme une pratique « clientéliste », cette réserve d’environ 130 millions d’euros par an allouée aux députés et sénateurs pour des subventions a été dépeinte comme un moyen « contrôlé » de soutenir collectivités et associations. Sa disparition risque de contribuer à des députés « hors sol », ajoutée au non cumul, ont plaidé certains orateurs.

Des applaudissements ont accueilli l’annonce des résultats. La ministre de la Justice Nicole Belloubet a ensuite salué « un grand acte de confiance sur lequel le gouvernement pourra s’appuyer ». Au nom du groupe REM, Paula Forteza, qui a affirmé que « malgré de nombreuses tentatives de déstabilisation, nos objectifs ont été atteints », a vanté une « étape cruciale du renouveau démocratique ».

REM et Modem ont massivement voté pour. Laurence Vichnievsky, du Modem, a vanté de « bons textes » contre des « dérives » mais « pas parfaits ni exhaustifs », d’autant qu’il « faudra du temps » pour restaurer la confiance. Elle a évoqué « quelques regrets », dont le refus de l’exécutif d’ouvrir partiellement le « verrou de Bercy ».

L’exécutif épargné par les mesures pour les Républicains

S’ils ont eu aussi voté oui, les Constructifs ont fait part de leurs réserves. Michel Zumkeller a exprimé un « vrai sentiment d’inachevé », vu « de bonnes mesures mais des lois d’ajustement de circonstances ». La socialiste Cécile Untermaier parle quant à elle de « rendez-vous manqué ».

Les députés LR regrettent de leur côté une « stigmatisation » des parlementaires et un exécutif épargné (36 pour, 11 abstentions, 4 contre dont le président Christian Jacob). « Deux engagements forts du président ont été trahis », a commenté le LR Philippe Gosselin, évoquant notamment l’obligation, abandonnée, de casier judiciaire vierge.

Insoumis, communistes et FN se sont abstenus. Jean-Luc Mélenchon admet les « turpitudes de quelques parlementaires » mais considère qu’en résumant à cet aspect « la crise politique, on ne s’intéresse pas au poids de l’argent ». Le communiste Fabien Roussel a pointé les limites d’une loi qui ne restaurera pas la confiance des Français dans leurs élus « si les injustices et inégalités perdurent ».

La semaine a été marquée par les tensions et les mises à l’épreuve de présidents de séance novices. « Tous les groupes d’opposition ont voulu tester notre capacité de résistance », estime Aurore Bergé, porte-parole REM.

Les textes déjà adoptés par le Sénat ont peu évolué à l’Assemblée. Reste maintenant aux députés et sénateurs à trouver une version commune. En cas d’échec la semaine prochaine, les textes seront réexaminés à l’automne.