Le patron de GMD, Alain Martineau, le seul repreneur en lice de GM&S, sur le site de l’équipementier automobile, à La Souterraine (Creuse), le 27 juillet. | PASCAL LACHENAUD / AFP

Après le fabricant de cabines d’engins de chantier Tim, à Quaëdypre (Nord), sauvé le 26 juillet par l’homme d’affaires bulgare Fil Filipov, un autre dossier social très sensible pour le gouvernement semble en passe de trouver sa conclusion provisoire : celui de l’équipementier automobile GM&S, à La Souterraine (Creuse). Là aussi, le tribunal de commerce de Poitiers, qui se réunit lundi 31 juillet, devrait écarter la fermeture pure et simple de cette usine-clé du département. La seule offre sur la table ne prévoit cependant de reprendre que 120 salariés sur 277 actuels, ce qui laisse sur le carreau plus de la moitié du personnel. Un résultat au goût très âcre.

Depuis des mois, un groupe industriel de 3 750 personnes, GMD (Groupe Mécanique Découpage), a marqué son intérêt pour une reprise partielle de son concurrent GM&S, tout en posant de nombreuses conditions. Les unes après les autres, celles-ci ont fini par être levées. En fin de semaine, le patron fondateur de GMD, Alain Martineau, a en particulier annoncé qu’il ne comptait plus exiger le soutien préalable du personnel, aujourd’hui très critique.

Lundi, le tribunal de Poitiers devrait logiquement constater qu’il dispose enfin d’une offre ferme et définitive, toutes les conditions ayant été remplies. Il ne désignera cependant sans doute pas immédiatement GMD comme repreneur de la société en liquidation, afin de permettre la consultation préalable du comité d’entreprise. Le tribunal pourrait prolonger la poursuite d’activité jusqu’à la fin août, puis confier formellement les clés à M. Martineau à ce moment-là. « GM&S est un grand malade qu’on se prépare à amputer, un délai ne sera pas de trop pour que le personnel encaisse ce coup », estime Jean-Louis Borie, l’avocat des salariés.

Le feuilleton GM&S n’est pas fini pour autant, loin de là. Les salariés, adhérents à la CGT en tête, comptent encore se battre pour améliorer le sort de ceux qui seront licenciés. Depuis des semaines, ils réclament que ceux-ci puissent partir avec des indemnités supérieures au minimum légal. Tour à tour, l’Etat, le repreneur et les constructeurs automobiles qui jouent un rôle majeur dans le dossier ont refusé de financer pareille mesure. « La question de l’indemnisation des “blessés” reste donc à régler, et j’essaie d’œuvrer sur ce terrain-là », précise M. Borie. Il n’exclut pas d’intenter une action en ce sens contre les constructeurs, quitte à se lancer dans des années de procédure.

Usine vieillissante

Le personnel demeure aussi sur le qui-vive quant à la relance prévue par M. Martineau. Ces dernières années, les GM&S ont déjà vu défiler deux repreneurs qui n’ont pas tenu leurs promesses et se sont payés sur la bête. Le groupe GMD sera-t-il plus fiable, ou est-il là pour poursuivre l’euthanasie du site, qui n’est désormais plus indispensable à Renault ni à PSA ? C’est la question que certains se posent.

« Alain Martineau veut construire quelque chose dans la durée, assure Benoît Métais, l’un des dirigeants de Siparex, actionnaire minoritaire de GMD. En vingt ans, son groupe est passé de moins de 100 millions à 750 millions d’euros de chiffre d’affaires. Aujourd’hui, il ne reprend pas GM&S seulement pour répondre aux souhaits des constructeurs, mais pour faire en sorte que ce site soit pérenne. C’est la raison pour laquelle il a mis ses conditions. »

Le rapport de force lui étant favorable, il a obtenu beaucoup. Montrés du doigt pour avoir laissé GM&S partir à la dérive, les constructeurs ont garanti 22 millions d’euros de commandes sur cinq ans. Avec l’Etat, ils se sont aussi engagés à financer 15 millions d’investissement. Le gouvernement, soucieux d’éviter la fermeture d’une des dernières usines de la Creuse, doit également s’occuper de la dépollution du site, et aider M. Martineau à acheter les murs. « Tout ce que l’Etat peut faire dans le cadre du droit national et européen, nous le faisons », a expliqué le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, dans un entretien à La Montagne. Avec l’espoir que tout cela permettra de redresser durablement une usine vieillissante qui en est à son troisième dépôt de bilan.