La résidence du vice-président kényan, William Ruto, près d’Eldoret (ouest), a été la cible d’une attaque, samedi 29 juillet, à quelques jours d’élections générales qui s’annoncent serrées et tendues. Un nombre inconnu d’hommes armés ont alors grièvement blessé un policier chargé de la sécurité et pénétré dans la propriété, ont indiqué des sources sécuritaires à l’AFP. Le siège, qui a duré vingt heures et au cours duquel un policier a été tué et un autre blessé, a pris fin dimanche matin lorsque les forces spéciales ont tué l’assaillant.

Samedi, le chef de la police du Kenya, Joseph Boinnet, avait affirmé que l’attaque – dont les motivations sont pour l’heure inconnues – avait commencé samedi, à la mi-journée, quand un agresseur armé d’une machette avait poignardé un policier chargé de la sécurité de la résidence, le blessant et lui volant son arme. Mais plusieurs sources sécuritaires ont indiqué à l’AFP que l’attaque avait été menée par plusieurs hommes munis d’armes à feu, dont certains auraient pu s’échapper.

Après l’arrivée de renforts policiers, l’assaillant s’est réfugié dans une pièce utilisée comme armurerie par la police affectée à cette résidence, l’une des mieux gardées du pays, prenant en otage un membre des forces spéciales, finalement tué, a déclaré Wanyama Musiambo, responsable des opérations de sécurité dans la vallée du Rift. « C’était une opération délicate parce qu’en étant dans l’armurerie, il avait un avantage et utilisait différentes armes […], on avait l’impression qu’il y avait plus qu’une personne qui tirait. »

« Stratagème »

William Ruto, qui réside la plupart du temps dans la capitale, Nairobi, avait quitté sa résidence secondaire environ une heure avant l’attaque. « Ceux qui cherchent à miner notre unité et nos progrès, ceux qui œuvrent pour nous détruire en tant que nation, ils ne réussiront pas », a réagi dimanche M. Ruto, lors d’un meeting en amont des élections du 8 août, présentant ses « condoléances » à la famille du policier des forces spéciales tué lors de l’attaque.

Le président sortant, Uhuru Kenyatta, et William Ruto, son colistier, briguent un second mandat à la tête du pays face au leader de l’opposition, Raila Odinga. « Cet incident est malheureux » a commenté Moses Wetang’ula, leader d’un des cinq partis de la coalition d’opposition dont M. Odinga est le candidat, cité par le quotidien Standard. Il a également dit espérer que l’attaque « n’est pas un stratagème visant » à s’attirer la sympathie des électeurs. Pour sa part, M. Kenyatta n’a pas parlé de l’attaque, dimanche, lors de plusieurs meetings auxquels il a participé.

Les Kényans sont appelés aux urnes le 8 août, dix ans après les pires violences électorales de l’histoire du Kenya indépendant (1 100 morts), alimentées par des contestations du résultat. A l’époque, la vallée du Rift avait été un des foyers des violences, avec des affrontements entre les Kikuyu, dont est issu M. Kenyatta, et les Kalenjin de M. Ruto. Les deux hommes s’étaient ensuite alliés et avaient remporté la présidentielle de 2013.

Intimidations

Les élections au Kenya se jouent rarement sur des programmes, beaucoup plus sur des sentiments d’appartenance ethnique et géographique. Début juillet, Human Rights Watch a fait état de menaces et d’intimidations entre communautés dans la région de Naivasha (centre), également dans la vallée du Rift. Les comtés de Laikipia et Baringo, toujours dans la vallée du Rift, sont par ailleurs le théâtre depuis le début de l’année de raids violents menés par des éleveurs semi-nomades.

Le scrutin s’annonce serré et la température électorale dans le pays, qui a fait face dans un récent passé à des attaques djihadistes meurtrières des Shebab somaliens, dont celles du centre commercial Westgate (2013) et de l’université de Garissa (2015), est montée d’un cran ces dernières semaines. Raila Odinga, qui estime que la victoire lui a été volée en 2007 et 2013, accuse l’exécutif de vouloir truquer les élections, M. Kenyatta rétorquant que son rival veut les retarder.