Gilles Roussel, président de la Conférence des présidents d’université (CPU), estime que le nombre de recours d’étudiants recalés en master reste « modeste et gérable ». Il pense qu’il « aurait peut-être fallu une régulation un peu plus forte » sur l’année de sélection en psychologie et en droit mais que « la réforme n’a pas nécessairement dégradé la situation ».

La sélection s’opère désormais dans certaines filières à l’entrée du master et déjà quelque 1 000 étudiants recalés ont déposé un recours devant le recteur de leur académie. Les universités auront-elles assez de places pour les accueillir ?

Nous comptons 70 universités. Donc, en moyenne, un peu plus de 100 étudiants par établissement ont déposé un recours. Cela reste vraiment modeste et gérable. C’est ce à quoi nous nous attendions, même s’il y a des concentrations sur certaines universités, notamment sur celles de Paris intra-muros.

En revanche, si nous avions eu à faire face aux demandes de plusieurs milliers d’étudiants, cela aurait posé des difficultés. Ce n’est pas le cas. Nous devrions être en mesure de trouver des solutions pour ces jeunes, même s’il faut attendre septembre pour réaliser un bilan complet puisqu’il existe un délai qui permet aux étudiants de saisir le rectorat.

Certaines universités n’ont-elles pas profité de ce nouveau droit pour diminuer le nombre de places en master afin de garder les meilleurs étudiants, laissant aux autres l’obligation d’accueil ?

Les rectorats ont dû s’assurer que les capacités d’accueil de cette rentrée 2017 sont au même niveau qu’en 2016. Le nombre d’étudiants qui seront accueillis en master ne devrait pas varier. La prochaine rentrée universitaire passée, il faudra toutefois faire un bilan global, en particulier dans certaines disciplines comme la psychologie, où certaines universités ont poursuivi leur sélection en deuxième année de master alors que d’autres ont commencé en première année. Cela peut créer de la confusion avec des flux d’étudiants qui iront d’une université à une autre en fonction de l’année de sélection choisie par l’établissement.

L’année de sélection, mais également les critères d’admission diffèrent entre les universités. Cela donne une impression d’improvisation. La réforme n’est-elle pas précipitée ?

En psychologie, et dans une moindre mesure en droit, il y a peut-être eu parfois un « emballement » pour la mise en place d’une sélection en master 1. Certains établissements ont procédé à une sélection dès la première année parce que l’université voisine l’avait fait et qu’ils ne pouvaient pas accueillir tous les étudiants. Il aurait peut-être fallu une régulation un peu plus forte sur ce point et dans ces disciplines. Mais ces dernières étaient sous tension les années précédentes et des d’étudiants restaient déjà sur le carreau. La réforme n’a pas nécessairement dégradé la situation.

Dans les autres disciplines, la mise en place s’est faite naturellement, même si cette année est celle de l’apprentissage de la réforme, pour les établissements comme pour les étudiants.

A la rentrée, vous déclariez au « Monde » que la réussite de la mise en place d’une plate-forme d’orientation en masters dépendrait de l’investissement du gouvernement. Quel bilan dressez-vous aujourd’hui ?

La plate-forme est perfectible. Toutes les universités n’ont pas intégré les informations nécessaires, l’offre de formation est encore parcellaire, le système de recours également peut être amélioré. Mais nous avons une première version qui sort à peu près dans les temps et qui donne les informations permettant aux étudiants de faire leurs choix et d’avoir une visibilité de l’offre de formation. Mais si elle reste telle quelle en 2018, je ne ferai pas le même bilan. Il faut continuer à investir et à travailler pour la rendre plus simple.

Vous évoquez la nécessité de faire des investissements. Avec 331 millions euros de coupes et un budget qui pourrait ne pas augmenter en 2018, quelles vont être les conséquences ?

Le président de la République a annoncé qu’il n’y aurait pas de budget en augmentation l’année prochaine. Dans ces conditions, nous considérons que, compte tenu du nombre d’étudiants qui arriveront dans l’enseignement supérieur en 2018, il n’est pas possible de demeurer à budget constant sans conséquences dans nos universités. Nous ne pouvons pas, par exemple, accueillir trois groupes de travaux dirigés en licence sans que cela ait un coût pour l’université.

Nos établissements sont déjà à la limite de la décence dans ce que nous pouvons offrir aux étudiants en licence. Nous avons fait part au gouvernement de notre grande inquiétude.