Un Neymar dans l’ombre, le 2 août à Barcelone. | JOSEP LAGO / AFP

A chaque jour son nouvel épisode. Depuis plus de deux semaines, le feuilleton du transfert de Neymar da Silva Santos Junior du FC Barcelone vers le Paris Saint-Germain alimente la chronique sportivo-médiatico-économique avec une régularité et un sens du suspense dignes d’une telenovela brésilienne. En attendant l’épilogue du Neymarshow, petit tour d’horizon des questions qui se posent, sans que l’on puisse forcément y répondre.

  • Quand doit être officialisé ce transfert ?

Le calendrier du PSG était assez clair : Neymar était attendu jeudi à Paris, pour signer son contrat vendredi et être présenté au public du Parc des Princes samedi après-midi à l’occasion de PSG-Amiens (17 heures), match de la première journée de la saison de Ligue 1. Mais le refus de Ligue espagnole de football d’enregistrer le paiement de la clause libératoire du joueur par un représentant du PSG, prélude nécessaire à la rupture de son contrat avec le FC Barcelone, a compliqué les choses, jeudi 3 août. Une situation qui semblait s’être réglée dans la soirée, le FC Barcelone ayant indiqué que Neymar avait officiellement quitté le club en lui payant directement sa clause libératoire.

La Ligue française de football (LFP) était auparavant entrée dans la danse en répondant par communiqué à son homologue espagnole, pour lui demander « de s’en tenir au règlement de la FIFA et à ses attributions ». C’est en effet vers la FIFA que les conseillers du joueur et du club parisien ont indiqué vouloir se tourner, afin qu’elle fasse respecter le processus de rupture du contrat, ou qu’elle autorise un transfert provisoire, en déposant potentiellement les 222 millions d’euros prévus chez un notaire. La LFP, qui « souhaite la venue de Neymar dans le championnat de Ligue 1 », a en tout cas proposé au PSG de l’aider au niveau juridique « pour que le contrat de Neymar soit homologué dans les meilleurs délais ».

Jeudi, le Brésilien était toujours à son domicile barcelonais, dûment cerné par des hordes de journalistes et de photographes. Il avait également reçu une lettre recommandée venant du Barça lui rappelant que le club catalan était toujours son employeur.

Prudent, le PSG ne communique toujours pas sur ce transfert, pas plus que l’intéressé, qui a laissé les médias prédire l’avenir en lisant entre les lignes de ses posts sur les réseaux sociaux. Seul le FC Barcelone a officiellement confirmé le départ du Brésilien, mardi, à l’issue de la reprise de l’entraînement, qu’il avait quitté prématurément après avoir dit au revoir à son entraîneur et à ses camarades, dont Lionel Messi. L’Argentin avait ensuite publié une petite vidéo compilant des photos souvenirs des deux joueurs, agrémenté d’un petit message émouvant se terminant par l’abréviation « tkm », pour « te quiero mucho » (« je t’aime beaucoup »), qui devrait lui assurer le Ballon d’or de la camaraderie.

  • Combien va coûter ce transfert ?

Au moins 222 millions d’euros, puisque c’est le montant de la clause libératoire qui figure dans le contrat que le Brésilien a signé à l’été 2016 avec le FC Barcelone. Interdit par la Ligue de football professionnel en France, ce type de clause est une pratique régulière en Espagne ou en Angleterre, où les clubs s’en servent pour dissuader d’éventuels prétendants, même si l’exemple de Neymar risque d’en révéler le double tranchant. Si les stars du FC Barcelone ont des clauses proches de celle de Neymar, à 250 millions d’euros pour Lionel Messi ou 225 pour Luis Suarez, le rival du Real Madrid n’a pas hésité à fixer celles de Cristiano Ronaldo et Gareth Bale à 1 milliard d’euros. Un tarif prohibitif. Comme celui de Neymar semblait l’être il y a un an.

A 222 millions d’euros, le transfert de Neymar vers le PSG en ferait d’ores et déjà le plus onéreux de l’histoire du football, plus du double du précédent record détenu par le Français Paul Pogba (105 millions, de la Juventus Turin vers Manchester United en 2016), mais aussi des deux Madrilènes Gareth Bale (101 millions, de Tottenham vers le Real en 2013) et Cristiano Ronaldo (94 millions d’euros, de Manchester United en 2009).

Mais le montant total du transfert devrait être encore plus élevé : comme c’est le joueur lui-même qui se libère de son contrat en payant la clause, avant d’être remboursé par le club acheteur, la somme est considérée comme une avance sur salaire ou une prime, et donc soumise à des charges fiscales. L’addition pourrait donc monter à plus de 300 millions d’euros.

Il restera ensuite au club parisien à assurer la rémunération annuelle du joueur, estimée à 30 millions d’euros net par an, ou 50 millions brut, soit le double de ce qu’il percevait en Catalogne.

  • Pourquoi la Ligue espagnole a-t-elle refusé le paiement de la clause de Neymar ?

Parce qu’elle estime que le club parisien ne respecte pas les règles du fair-play financier (FPF), mécanisme institué par l’Union européenne de football (UEFA) en 2010 pour éviter que les clubs ne dépensent plus d’argent qu’ils n’en gagnent. « Nous n’acceptons pas cet argent d’un club comme le PSG qui (…) enfreint les normes et les lois du fair-play financier de l’UEFA », a déclaré Javier Tebas, président de la Liga espagnole, au quotidien sportif As. Dans un entretien au journal L’Equipe, jeudi 3 août, le dirigeant précise : « Notre but ? Que Paris soit sanctionné par l’UEFA sur le terrain sportif et qu’il arrête d’avoir des revenus fictifs, qui peuvent amener l’Union européenne à décider d’importantes sanctions économiques qui paralyseraient son activité. »

Contactée par Le Monde, l’UEFA assure qu’elle « regardera les détails de ce transfert s’il aboutit, indépendamment d’une quelconque plainte ». « Le PSG doit démontrer qu’il peut avoir des pertes sur trois ans qui ne dépassent pas les 30 millions d’euros, poursuit la confédération. L’impact de l’arrivée éventuelle de Neymar à Paris se ressentira sur plusieurs années, mais il est très difficile de juger ce type d’opération par avance, puisque nous ne connaissons pas leurs plans. »

  • Comment le PSG peut-il financer un tel transfert ?

Bonne question, qui reste pour l’instant sans réponse. Les détails du montage financier imaginé par le PSG pour enrôler Neymar ne sont pas connus, ce qui n’a pas manqué d’alimenter certaines rumeurs, dont celle qui verrait le PSG faire financer l’investissement par l’Etat du Qatar lui-même, ou par le biais de l’autorité du tourisme du Qatar (QTA), avec par exemple un contrat d’image faisant du Brésilien un ambassadeur de prestige pour l’émirat. Rien n’indique que le club parisien, qui sait que cette opération sera examinée sous toutes ses coutures par les différentes instances européennes, envisage de prendre de tels risques.

En 2014, le Paris-Saint-Germain avait déjà été rattrapé par le FPF, et l’UEFA avait infligé au club de la capitale une amende de 60 millions d’euros, dont 20 ferme. L’institution européenne avait épinglé le contrat d’image passé par le PSG avec la QTA pour un montant de 200 millions d’euros annuels, jugé comme fortement surévalué. En cas de nouvelles sanctions, celles-ci pourraient dépasser le cadre d’une amende ou d’une interdiction de recrutement, et conduire par exemple à une suspension de toutes les compétitions européennes, Ligue des champions comprise.

Neymar Jr, le 6 juin 2015 après la victoire du Barça en Ligue des champions. | PATRIK STOLLARZ / AFP

Devant la boutique du PSG, le 3 août à Paris. | PHILIPPE LOPEZ / AFP

Pour éviter la sortie de route, et faire honneur à la devise parisienne du Fluctuat nec mergitur, le PSG devra a priori augmenter ses revenus (billetterie, merchandising, droits télévisés, partenariats…) mais aussi alléger sa masse salariale, et donc vendre plusieurs joueurs. C’était prévu pour certains devenus indésirables, comme l’Ivoirien Serge Aurier, l’Espagnol Jesé, le Français Hatem Ben Arfa ou le Polonais Grzegorz Krychowiak. Beaucoup moins pour d’autres, dont certains restent des cadres de l’équipe, comme les Argentins Angel Di Maria et Javier Pastore ou le Français Blaise Matuidi.

Peut-être que le plus dur commence pour le PSG.

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