Les Mauritaniens ont commencé samedi 5 août à se prononcer par référendum sur une révision de la Constitution prévoyant notamment la suppression du Sénat et qui a été dénoncée par les principaux partis de l’opposition, lesquels appellent au boycott.

Après une campagne houleuse, émaillée de tensions voire de violences lors de manifestations de l’opposition, les bureaux de vote ont comme prévu ouvert à 7 heures, heure locale (9 heures, heure de Paris). Les résultats du scrutin dans ce vaste pays en grande partie désertique limitrophe du Sénégal, du Mali, de l’Algérie et du Sahara occidental sont attendus en début de semaine prochaine.

Pendant la campagne, l’opposition dite « radicale » a crié au « coup de force » du président Mohamed Ould Abdel Aziz, 60 ans, qu’elle soupçonne de vouloir créer un précédent qui pourrait faciliter à terme la suppression de la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels. Un des enjeux sera le taux de participation parmi les inscrits, au nom de quelque 1,4 million.

Un nouveau drapeau national

Elaborée en septembre-octobre lors d’un dialogue entre le pouvoir et l’opposition dite modérée, cette révision porte sur le remplacement du Sénat par des Conseils régionaux élus et sur la suppression du médiateur de la République et du Haut Conseil islamique. Elle prévoit également une modification du drapeau national, auquel seraient ajoutées deux bandes rouges pour « valoriser le sacrifice des martyrs » de la résistance à la colonisation française, qui s’est achevée en 1960. En mars, la révision de la loi fondamentale a été adoptée par l’Assemblée nationale, mais rejetée par le Sénat. Le président a passé outre en convoquant dans la foulée un référendum.

Le dernier jour de la campagne, jeudi, a de nouveau été marqué par des interventions musclées de la police, qui a dispersé à coups de gaz lacrymogène et de matraque des opposants dans trois quartiers de la capitale, Nouakchott. A Genève, le bureau des droits de l’homme de l’ONU s’est dit « préoccupé » par le climat de la campagne et « l’apparente suppression de certaines voix dissidentes ».

Des sénateurs accusés de corruption par le président

Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 2008, le président Abdel Aziz, un ancien général élu en 2009 puis réélu en 2014 pour cinq ans, doit faire face à une fronde du Sénat, pourtant majoritairement favorable au pouvoir, qui s’est cabré contre un texte signifiant sa disparition. Alors qu’une vingtaine de sénateurs ont entamé mercredi un sit-in au Parlement afin d’exiger des excuses du président pour les avoir accusés de corruption et pour qu’il renonce au référendum, M. Abdel Aziz a renouvelé ses accusations lors de son dernier grand meeting de campagne jeudi soir à Nouakchott.

« Ils me demandent de leur présenter des excuses, je ne le ferai jamais », a lancé le chef de l’Etat, en estimant que ces sénateurs avaient « trahi la nation ». « Ces gens ont, selon leurs propres dires, procédé à des partages d’argent pris sur des hommes d’affaires pour saper les institutions du pays », a-t-il accusé, appelant la foule de ses partisans à décréter la dissolution du Sénat « qui coûte très cher et ne correspond à rien, à aucun besoin ».

L’opposition soupçonne le chef de l’Etat de vouloir aller au-delà de son second mandat, qui s’achève en 2019, malgré ses dénégations répétées.