Documentaire sur Arte à 22 h 30

Horror of Dracula Official Trailer #1 - Christopher Lee Movie (1958) HD

C’est l’histoire excitante d’une petite en­treprise cinématographique britannique pas comme les autres. Un studio indépendant qui, entre le milieu des années 1950 et le début des années 1970, aura eu un impact culturel inattendu. Sa recette ? Pas mal de sang, un peu de sexe et beaucoup d’horreur, en couleurs. En s’appuyant notamment sur la renaissance à l’écran de mythes littéraires comme Dracula ou la créature de Frankenstein.

Riche en témoignages passionnants (de John Carpenter à Christopher Lee en passant par Dario Argento et Joann Sfar, pour ne ­citer qu’eux) et truffé d’extraits de films plus terrifiants et comiques les uns que les autres, ce documentaire retrace avec une énergie communicative l’aventure de la Hammer et de ses petits studios basés à Bray, à l’ouest de Londres.

Christopher Lee dans « Le Cauchemar de Dracula », de Terence Fisher (1958). | © HAMMER FILMS

Au milieu des années 1950, alors que la télé commence à menacer le cinéma, la Hammer, qui réalise des comédies et des films d’espionnage, connaît de sérieuses difficultés économiques. Au début de l’été 1955, l’entreprise de cent vingt collaborateurs joue son va-tout avec The Quatermass Xperiment, mélange de science-fiction et d’horreur en noir et blanc, transgressant allégrement les limites du bon goût britannique. L’impact du film est immédiat, notamment aux Etats-Unis. La Hammer tient un filon : le film d’horreur à l’accent britannique.

La trilogie du succès

Jusqu’à présent, ce sont les grands studios américains qui régnaient sur ce genre cinématographique. Cette fois, profitant de l’engouement pour la pop culture made in England, la petite entreprise va régner pendant quelques années sur le monde de l’horreur filmée.

En 1957, grande nouveauté : l’horreur se regarde en couleurs avec Frankenstein s’est échappé. On est loin du Frankenstein, interprété par Boris Karloff en 1931 et produit de l’autre côté de l’Atlantique par Universal. Cette fois, le sang gicle, bien rouge, on enfonce une tête coupée dans l’acide, l’héroïne est sexy et Christopher Lee, comédien peu connu de 35 ans, endosse avec brio le rôle-titre.

En 1958, c’est un autre personnage de roman qui fait le bonheur de la Hammer : avec Le Cauchemar de Dracula, les scènes sexuellement explicites se multiplient. Et Christopher Lee, toujours lui, interprète pour la première fois un rôle qui ne le quittera pas de sitôt, puisqu’il enchaînera sept films draculesques avec la Hammer ! Une entreprise qui, en dépit du succès, continue de fonctionner à l’ancienne : petite équipe de techniciens, de comédiens (notamment le duo Christopher Lee-Peter Cushing) et de réalisateurs. Tournages dans les mêmes décors (notamment le château de Bray), le tout dans une atmosphère détendue et familiale.

Horror of Dracula Official Trailer #1 - Christopher Lee Movie (1958) HD

Epouvante, couleurs, sexe, la trilogie du succès de la Hammer ne va pas durer éternellement. Les films d’Hitchcock, mais aussi La Nuit des morts-vivants (1968), de George Romero, ou L’Exorciste (1973), de William Friedkin, donneront un sacré coup de vieux aux productions de la Hammer qui tente, dans les années 1970, sans grand succès, de mélanger horreur et kung-fu, par exemple. Exsangue financièrement en 1979, la Hammer a été reprise en 2007 et développe de nouveaux projets. Mais la période bénie et baignée de sang est bien terminée.

Dans les entrailles de la Hammer, de Jérôme Korkikian (Fr., 2017, 55 min).