Pierre-Ambroise Bosse peut planer avec le drapeau tricolore. Il est champion du monde du 800 m. / BEN STANSALL / AFP

La délégation française a enfin ouvert son compteur à Londres, mardi 8 août. La soirée a réservé son lot de surprises avec la superbe performance de Pierre-Ambroise Bosse, vainqueur du 800 m, et la troisième place de Renaud Lavillenie au saut à la perche.

  • La perf

On le savait fantasque et imprévisible, surtout lors de ses déclarations à la presse, mais qui aurait pu imaginer que Pierre-Ambroise Bosse soit sacré, mardi, champion du monde du 800 m. Le chanceux qui a parié sur la victoire du jeune Français chez les bookmakers anglais doit avoir le sourire.

Le Girondin s’est imposé en 1 min 44 s 67, son meilleur chrono de l’année. Derrière lui, le Polonais Adam Kszczot et le Kényan Kipyegon Bett n’ont rien pu faire face à son démarrage tardif et soudain, un peu avant les 200 derniers mètres. Et au lieu de craquer comme on pouvait le craindre, il a résisté et encore résisté. L’incrédulité se mêlait à la joie dans le morceau de tribune de presse où sont concentrés les journalistes français.

Depuis les Jeux de Rio, où il avait terminé à la 4e place, Pierre-Ambroise Bosse vivait une saison 2017 compliquée, perturbée par de nombreuses blessures. Il a aussi connu le changement au niveau du coaching en rejoignant Alain Lignier. En demi-finale, il s’était qualifié de justesse et ne cachait pas ses difficultés, franc et nature comme à son habitude :

« J’étais encore un peu nerveux au départ. Cela prouve que je ne suis pas non plus dans mon assiette. Il y a beaucoup moins de niveau cette année. Est-ce que ça me concerne aussi ? Bien sûr que oui. »

Jamais monté sur un podium mondial ou olympique, Pierre-Ambroise Bosse confirme enfin à 25 ans les énormes espoirs placés en lui depuis ses débuts. Il devient également le premier Français médaillé aux championnats du monde sur 800 m.

Il y a deux jours, dans une déclaration lunaire dont lui seul a le secret, il espérait que « son alter ego avec le sabre rouge [le sabre rouge est à l’intérieur de son corps car il se juge trop gentil] sorte pour pondre un truc sympa ». Apparemment, Pierre-Ambroise Bosse est devenu un mauvais garçon sur la piste londonienne. Et ça lui réussit plutôt pas mal.

  • La perf mi-figue, mi-raisin

Sam Kendricks était trop fort. Ultra-dominateur cette saison, l’Américain n’a laissé aucune chance à Renaud Lavillenie. Il semble bien que cette année, pour sa cinquième finale mondiale, le recordman du monde soit tombé sur plus fort que lui. Derrière le Polonais Piotr Lisek, le Français a pris la troisième place, se consolant avec une quatrième médaille de bronze en cinq Mondiaux.

Malgré ce énième échec lors d’une finale mondiale – seul titre qui manque à son palmarès –, le Charentais n’aura rien à se reprocher. Il a même réussi sa meilleure performance de l’année sur le sautoir du stade olympique. En difficulté à 5,82 m et à 5,89 m, il a trouvé des ressources pour effacer cette barre à son dernier essai. Les images de ses désillusions passées, Rio étant la plus forte, ont dû pourtant lui revenir en tête avant de s’élancer, la perche à la main.

Sam Kendricks (à droite) et Renaud Lavillenie se félicitent. L’un est champion du monde, l’autre est médaillé de bronze du saut à la perche. / KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP

Dans le même temps, l’officier de réserve de l’armée des Etats-Unis, Sam Kendricks, franchissait cinq barres sans coup férir : 5,50 m, 5,60 m, 5, 75 m, 5,82 m et 5,89 m. A l’image de la saison, qu’il a dominée de la tête et des épaules, battant à quatre reprises Lavillenie en meeting, effaçant pour la première fois 6 mètres lors des championnats des Etats-Unis, Kendricks a maîtrisé le concours.

Pour mieux asseoir sa suprématie, il a même effacé 5,95 m au troisième essai quand Renaud Lavillenie échouait deux fois à cette hauteur. La foule a retenu son souffle pour la dernière tentative du Français à 6,01 m mais la barre était encore trop haute pour le recordman du monde qui n’avait, avant Londres, pas dépassé les 5,87 m en 2017.

  • C’est (vite) vu

Wayde van Niekerk est champion du monde du 400 m. / GLYN KIRK / AFP

Contrairement aux apparences, Wayde van Niekerk n’a pas eu besoin d’allumer le feu pour remporter son deuxième titre mondial sur le tour de piste. L’athlète sud-africain de 25 ans, découvert en 2015 à Pékin, s’est imposé en 43 s 98, loin de son record du monde établi lors des Jeux de Rio (43 s 03).

En l’absence de Kirani James et surtout d’Isaac Makwala, mis en quarantaine par la santé publique anglaise en raison d’une épidémie de gastro-entérite et empêché de rentrer dans le stade ce soir, van Niekerk a survolé la concurrence reléguée à plus de 40 centièmes. Jeudi, il tentera le doublé 200-400 m. En l’absence de Usain Bolt, Justin Gatlin et Andre De Grasse, tous les espoirs sont permis.

  • Zone mixte

« Aujourd’hui j’ai été spectateur de la course, je n’ai pas été acteur. Je regardais mes adversaires attaquer, moi je ne réagissais pas. Et quand j’accélère, c’est trop tard. Je n’étais pas en confiance. »

Gros regrets pour Mahiedine Mekhissi à l’arrivée du 3 000 m steeple. Le Français, auteur d’une remontée aussi remarquable que vaine lors du dernier tour, échoue à un souffle de l’Américain Evan Jager.

En zone mixte, la question qui agitait les journalistes lui fut rapidement posée : pourquoi n’a-t-il pas suivi les Kényans, le Marocain Soufiane Elbakkali et Evan Jager quand ils ont doucement décroché le peloton ? « J’ai été blessé cette année, je suis arrivé ici malade, je suis encore un peu malade, a-t-il contextualisé. Je prenais des médicaments. Je n’étais pas en confiance et ça s’est vu pendant la course. J’ai commis des erreurs de débutant. Je pense que si j’étais resté au contact, la course elle était pour moi quand on voit comment je termine. Mais bon, je suis revenu trop tard. »

Absent à Pékin en 2015, mais médaillé de bronze aux Mondiaux de Daegu en 2011 et de Moscou en 2013, Mekhissi rate de peu un troisième podium à ce niveau. Et contrairement à Rio, il n’y a pas eu de réclamation pour venir à son secours.

  • Les podiums du jour

Lancer du javelot féminin : 1. Barbora Spotakova (République tchèque) 2. Lingwei Li (Chine) 3. Huihui Lyu (Chine)

Saut à la perche masculin : 1. Sam Kendricks (Etats-Unis) 2. Piotr Lisek (Pologne) 3. Renaud Lavillenie (France)

3000 m steeple masculin : 1. Conseslus Kipruto (Kenya) 2. Soufiane Elbakkali (Maroc) 3. Evan Jager (Etats-Unis)

800 m masculin : 1. Pierre-Ambroise Bosse (France) 2. Adam Kszczot (Pologne) 3. Kipyegon Bett (Kenya)

400 m masculin : 1. Wayde van Niekerk (Afrique du Sud) 2. Steven Gardiner (Bahamas) 3. Abdalelah Haroun (Qatar)

  • Les prochaines finales (mercredi 9 août)

21 h 25 : finale du lancer du poids féminin

22 h 33 : finale du 400 m haies masculin

22 h 50 : finale du 400 m féminin