La polémique avait déjà éclaté il y a trois ans, lorsque la ville de Seattle, aux Etats-Unis, avait offert deux drones à Los Angeles. L’annonce par la police de la ville en début de semaine du lancement d’un programme pilote d’un an a réveillé les contestations.

Alors qu’une commission composée de civils bénévoles nommés par le maire et chargée de mettre en place la politique générale de la police de Los Angeles se réunissait pour rendre son avis sur le projet, des manifestants ont fait part de leur opposition, mardi 8 août, relate le Los Angeles Times. Pourtant, le discours des forces de l’ordre se voulait rassurant : l’engin ne pourra être déployé qu’en cas de prise d’otage, d’incendie, de détection d’une bombe ou face à un forcené barricadé, et ne sera pas armé. Ils le considèrent comme un « outil de bon sens qui peut assurer la sécurité des résidents et des agents en cas de situations dangereuses ».

Plusieurs voix se sont malgré tout élevées, fustigeant une absence de concertation avec la population :

« Les drones représentent une importante menace pour la vie privée. Ils ne devraient être autorisés qu’après un solide débat public », a plaidé Melanie Ochoa, avocate membre de l’Union américaine pour les libertés civiles en Caroline du Sud.

Les opposants craignent que ces robots ne soient utilisés à terme pour de la surveillance aérienne, voire qu’une arme soit montée sur l’engin. « Ce que ça représente, c’est l’escalade et la militarisation galopante de la police », a affirmé Hamid Khan, le fondateur de Stop LAPD Spying Coalition, un collectif d’activistes qui militent pour le respect des libertés individuelles face à la police.

Les détracteurs craignent des dérives

Si le LAPD (Los Angeles Police Department) assure que chaque vol fera l’objet d’un contrôle assidu grâce, notamment, à des rapports systématiques et une demande d’autorisation préalable des autorités fédérales de l’aviation, les détracteurs redoutent que les autorités puissent a posteriori modifier la portée des missions, sans contrôle par les habitants.

La méfiance des Angelins n’est pas infondée. En 2012, le bureau du shérif avait fait survoler les rues de Compton par avion pendant neuf jours afin d’attraper les criminels. Une opération menée en secret qui avait alors déclenché une vague de critiques. Patrisse Khan-Cullors, cofondatrice du mouvement Black Lives Matter (les vies noires comptent) a alerté l’administration : « Cette décision érode un peu plus les relations entre la communauté [noire] et la police », déjà mises à mal par des faits divers racistes ces derniers mois, et par le virage sécuritaire opéré par Donald Trump.

A l’issue de la séance de la commission, son président, Matthew Johnson, avocat exerçant dans le monde du divertissement, s’est dit préoccupé :

« La technologie a le potentiel pour sauver des vies. (…) Notre défi sera de développer des mesures et une surveillance fortes, pour diriger ce programme et empêcher abus et dérives. »

En juin, les pompiers de la ville ont, quant à eux, obtenu l’aval de la commission de leur profession pour utiliser des drones lors des feux ou autres urgences pour lesquelles ils pourraient être appelés à intervenir.

La controverse s’étend au-delà de la Californie. En 2015, le Dakota du Nord a été le premier état à légaliser l’équipement de drones en armes non létales, comme des balles en caoutchouc, du gaz lacrymogène ou des tasers. Le Connecticut réfléchit ces derniers mois à la mise en place d’une loi similaire.