Le premier ministre japonais, Shinzo Abe, le 3 août, à Tokyo. | Shizuo Kambayashi / AP

Soucieux de relancer sa politique économique pour regagner la confiance de la population, le gouvernement japonais peut compter sur une conjoncture favorable. Le climat positif s’est traduit par une hausse du produit intérieur brut (PIB) dépassant les attentes. Selon les données préliminaires dévoilées lundi 14 août, la croissance de l’archipel a atteint 1 % entre avril et juin, soit 4 % en glissement annuel. Autre bonne surprise pour le gouvernement : la croissance a grandement bénéficié de la hausse de 0,9 % de la consommation des ménages, plus que les 0,5 % attendus par les analystes.

Les dépenses des foyers – tirées cette fois par les achats de biens durables – génèrent près de 60 % du PIB nippon. Après un an de morosité, elles ont largement compensé la contraction de 0,5 % des exportations, moteur traditionnel de la croissance, et apparaissent moins comme le point faible de l’activité. Les investissements des entreprises ont également crû, de 2,4 %, le niveau le plus élevé depuis le premier trimestre 2014. Les investissements publics ont progressé de 5,1 %, grâce notamment aux travaux pour les Jeux olympiques de Tokyo en 2020.

La troisième économie mondiale affiche un sixième trimestre d’affilée de croissance, une première depuis les années 2005-2006. La progression observée entre avril est juin est la plus forte depuis plus de deux ans.

Les résultats restent mitigés

Ces données sont bienvenues pour le gouvernement du premier ministre Shinzo Abe, dont la cote de popularité a fortement baissé en raison de scandales de trafic d’influence présumé. Les difficultés l’ont incité à remanier son gouvernement le 3 août, et à tenter de relancer les « Abenomics ». Au moment de son retour au pouvoir en 2012, M. Abe avait promu cette politique composée de trois « flèches » : relance budgétaire, assouplissement monétaire et réformes structurelles. Les deux premières ont été « décochées » sans grandes difficultés, mais la troisième se fait toujours attendre. Et les résultats restent mitigés.

Si le chômage est au plus bas à 2,8 %, le salaire réel a reculé en juin, pour la première fois en treize mois, de 0,4 %, à 429 686 yens (3 316 euros), bonus et heures supplémentaires inclus. Les commandes de machines ont reculé de 1,9 % en juin, pour le troisième mois d’affilée. De même, l’objectif de 2 % d’inflation annuel fixé par la Banque du Japon (BoJ) n’est pas encore atteint. Au moment de sa prise de fonction en 2013, le gouverneur Haruhiko Kuroda avait pris l’engagement d’y parvenir en deux ans. Cet objectif a été repoussé à six reprises, la dernière fois le 20 juillet, en raison de la morosité de la demande privée. La hausse des prix n’a pas dépassé 0,4 % en juin.

De quoi inciter le ministre de l’économie, Toshimitsu Motegi, à une certaine prudence sur les perspectives de la demande intérieure. « Si vous me demandez si la consommation privée s’est complètement redressée, a-t-il déclaré après l’annonce des chiffres de la croissance, je vous dirais qu’elle manque encore de dynamisme dans certains domaines, ce qui nécessite de nouvelles mesures. »

Politique commerciale

L’embellie récente est essentiellement liée à « des conditions extérieures favorables », estime de son côté le Fonds monétaire international (FMI), qui appelle le gouvernement à saisir « l’occasion pour faire avancer un ensemble de réformes global et coordonné ».

Parmi les priorités du nouveau gouvernement Abe figure la politique commerciale avec la refonte du Partenariat transpacifique (PTP), un accord de libre-échange qui implique 12 pays du pourtour du Pacifique. Le président américain Donald Trump a décidé dès sa prise de fonction en janvier d’en retirer les Etats-Unis. Le Japon et les autres pays doivent se réunir en Australie fin août pour discuter de l’avenir de ce cadre auquel tient particulièrement Tokyo.

Le Japon est également impliqué dans les négociations du Partenariat économique régional global (RCEP) avec la Chine, la Corée du Sud et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, l’ASEAN, qui aimerait le conclure avant la fin 2017. Tokyo a également validé en juillet le principe d’un accord de libre-échange avec l’Union européenne.

Sur le plan intérieur, le gouvernement veut augmenter le potentiel de croissance estimé à environ 1 % par an. Il mise pour cela sur une amélioration de la productivité des travailleurs. Dans un projet de stratégie de croissance dévoilé en juin, il envisage un usage accru des technologies comme l’intelligence artificielle, le big data ou encore l’Internet des objets, et des assouplissements réglementaires pour promouvoir l’innovation dans ces domaines.