La recrue milanaise Leonardo Bonucci, le 3 août. / Antonio Calanni / AP

Avide d’écrire une nouvelle page de son histoire, le Milan AC est sans conteste le principal objet de curiosité de la saison 2017-2018 du championnat italien, qui s’ouvre ce week-end. En cette journée inaugurale, les Rossoneri se déplacent en Calabre pour défier Crotone, dimanche 20 août (à 20h45). Les performances de la formation lombarde seront d’autant plus scrutées que ce nouvel exercice de la Serie A coïncide avec l’an I, à la tête du club, du groupe d’investisseurs chinois Rossoneri Sport Investment Lux.

En avril, ledit groupe a racheté l’institution milanaise à l’ex-chef du gouvernement italien (1994-1995 ; 2001-2006 ; 2008-2011) Silvio Berlusconi pour 720 millions d’euros. Promu numéro un du club, l’homme d’affaires Li Yonghong a ainsi succédé à son propriétaire historique, qui avait acquis l’équipe en février 1986 et en avait fait une machine à gagner durant son règne de trente et un ans.

Loin de la razzia opérée à l’échelle nationale et européenne (une trentaine de titres, dont cinq victoires en Ligue des champions et huit succès en Serie A) par le « Grand Milan », les dernières années de l’ère berlusconienne ont charrié leur lot de désillusions sportives et financières. Les ennuis judiciaires et la chute politique du « Cavaliere » ne sont pas étrangers à ces déconvenues. Avant même son arrivée aux commandes du Milan AC, Rossoneri Sport Investment Lux avait injecté 90 millions euros pour couvrir les frais de fonctionnement du club, endetté à hauteur de 220 millions d’euros depuis juillet 2016.

350 millions d’euros investis sur trois ans

Les nouveaux propriétaires se sont engagés à investir 350 millions d’euros en trois ans afin de « ramener le Milan tout en haut. » Il faut dire que les Rossoneri, privés de Coupe d’Europe ces trois dernières saisons, n’ont plus gagné la Serie A depuis 2011. Et ils n’ont réussi à faire leur retour sur la scène continentale que par la petite porte : en accrochant les tours qualificatifs de Ligue Europa à la faveur d’une sixième place en Serie A. Un strapontin arraché au nez et à la barbe du rival historique de l’Inter Milan, racheté en 2016 par le géant chinois de la distribution, Suning Commerce Group, contre 270 millions d’euros.

« Même si la formule «nouvelle ère » paraît un peu emphatique dans ces circonstances, il ne fait aucun doute que le changement a été dramatique à bien des égards : les nouveaux propriétaires ont investi 720 millions d’euros pour être les successeurs de l’ère Berlusconi, soit trente et un ans incroyablement réussis et durant lesquels le club était constamment en « Une » aussi pour des raisons politiques», confie au Monde l’avocat Roberto Cappelli, l’un des huit membres du nouveau conseil d’administration du Milan AC.

«En outre, le Milan AC est, pour la ville de Milan, beaucoup plus qu’un club de foot, et le fait que les nouveaux propriétaires soient chinois a même choqué certaines personnes, en considérant que l’autre club milanais a été acheté par des investisseurs chinois l’an passé, fait remarquer M. Cappelli. Au début, nos actionnaires suscitaient beaucoup de scepticisme et de critiques, mais l’approche très sérieuse et efficace de la nouvelle direction, associée à la reconnaissance que, pour une fois, les nouveaux arrivants n’ont pas fait de promesses mais ont vraiment agi, a complètement modifié l’opinion des gens. Maintenant, il y a beaucoup d’enthousiasme et d’espoir. Et le défi est d’éviter la frustration. »

Des transactions audacieuses lors du mercato estival

Afin de remobiliser les tifosi rossoneri, les nouveaux actionnaires ont été particulièrement actifs lors du mercato estival, dépensant plus de 200 millions d’euros en transferts. Tout en entérinant une quinzaine départs et en rajeunissant leur effectif, ils ont enrôlé une dizaine de recrues dont le milieu argentin de la Lazio de Rome, Lucas Biglia, et l’attaquant brésilien, André Silva. Mais la plus grosse opération reste l’acquisition, contre 40 millions d’euros, du défenseur central de la Juventus Turin, Leonardo Bonucci, 30 ans, promu capitaine et considéré comme l’un des meilleurs spécialistes du poste. Une transaction en forme de mise en garde adressée aux locomotives de Serie A.

« Dans cent jours, j’espère que Milan sera une équipe et j’attends de voir le fruit de mon travail, s’est épanché, en juin, l’entraîneur milanais et ex-attaquant de l’AS Roma, Vincenzo Montella, dans les colonnes de la Gazzetta dello Sport. Dans mille jours, j’espère que le championnat ne sera plus un rêve mais un objectif réalisable. J’aimerais pouvoir remettre ce club dans le top 5 mondial.»

Les joueurs du Milan AC, le 3 août. / Antonio Calanni / AP

Le marché asiatique en ligne de mire

« L’objectif est de revenir au sommet, mais tout le monde au Milan AC est très conscient que ceci ne peut pas être fait en une saison, développe Roberto Cappelli, alors que le club a remporté sa dernière Ligue des champions en 2007. La direction a soumis un business plan- approuvé par les nouveaux propriétaires - qui porte sur les résultats à moyen terme. Rome n’a pas été construite en un jour. » Reléguée au 16e rang des équipes les plus riches d’Europe (215 millions d’euros de revenus à l’issue de la saison 2015-2016), selon le cabinet d’audit Deloitte, la formation lombarde rebondira-t-elle aussi financièrement grâce à ses nouveaux propriétaires chinois ?

« On veut ramener le Milan AC à la place qui lui appartient sur le plan sportif et renforcer la base économique du club, en améliorant notre présence sur les marchés internationaux, évidemment avec une attention particulière portée à la pénétration de la marque en Chine et plus généralement en Asie, où elle est déjà très connue, détaille M. Cappelli, l’un des quatre italiens à siéger au « board » du Milan AC. Il y a plein d’opportunités à exploiter. Pour atteindre ces résultats, le nouveau propriétaire a adopté une approche entrepreneuriale très sérieuse, réunissant des équipes de gestion de première classe en Italie et en Chine. »

Pour amorcer son grand retour sur la scène européenne et s’offrir une visibilité planétaire, le Milan AC devra déjà confirmer, jeudi 24 août, en barrages retour, sa large victoire acquise (6-0) à l’aller face aux Macédoniens du Shkendija Tetovo. Une formalité pour des Rossoneri désireux de retrouver la lumière.