Au Mali, le référendum constitutionnel une nouvelle fois reporté
Au Mali, le référendum constitutionnel une nouvelle fois reporté
Le Monde.fr avec AFP
Le président Ibrahim Boubacar Keïta a jugé que le « climat actuel » ne permettait pas « d’expliquer tous les bénéfices » qu’apporterait la révision de la Constitution.
Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, a décidé de « surseoir » à l’organisation d’un référendum sur son projet de révision de la Constitution, une décision célébrée samedi 19 août dans les rues de Bamako par plusieurs milliers d’opposants.
« Dans l’intérêt supérieur de la nation et de la préservation d’un climat social apaisé, j’ai décidé, en toute responsabilité, de surseoir à l’organisation d’un référendum sur la révision constitutionnelle », a déclaré Ibrahim Boubacar Keïta vendredi au soir, à la télévision.
Dans son allocution, le chef de l’Etat malien a souligné que son « devoir » était « d’expliquer tous les bénéfices que la révision constitutionnelle apporterait au rétablissement de la paix, à la consolidation de nos institutions et à l’amélioration de la gouvernance ». « Je constate toutefois que dans le climat actuel ces explications peinent à être entendues et acceptées », a ajouté Ibrahim Boubacar Keïta. « Nous devons prendre le temps de nous retrouver pour échanger sans détour », a-t-il estimé, tout en regrettant que de « profonds clivages menacent d’ébranler durablement (la) cohésion nationale ».
« Nous sommes ici pour célébrer une victoire, le retrait du projet référendaire. Nous remercions les milliers de militants qui sont présents au meeting. Nous resterons vigilants pour la suite », a déclaré Amadou Thiam, vice-président de la plateforme « Touche pas à ma Constitution », qui a rassemblé quelques milliers de personnes dans les rues de la capitale malienne samedi, selon un correspondant de l’AFP.
Création d’un Sénat
Le 21 juin, le gouvernement malien avait déjà décidé de reporter à une date ultérieure le référendum initialement prévu le 9 juillet 2017. La révision de la Constitution de 1992, la première depuis vingt-cinq ans, vise notamment à « mettre en œuvre certains engagements de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali » signé en mai-juin 2015 entre le gouvernement et l’ex-rébellion à dominante touareg du nord du pays. Elle prévoit aussi la création d’un Sénat et d’une Cour des comptes.
Le 5 juillet, la Cour constitutionnelle avait demandé au gouvernement d’apporter des « corrections » au projet de révision constitutionnelle, acceptant la requête de l’opposition sur l’article évoquant la durée du mandat des sénateurs désignés par le président, qui n’était nullement mentionnée dans le texte. En revanche, la Cour avait rejeté une autre requête réclamant l’annulation du référendum déposée par l’opposition, qui avait organisé plusieurs manifestations.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda. Les djihadistes ont été en grande partie chassés par une intervention militaire internationale lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France. Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes, françaises et de l’ONU, régulièrement visées par des attaques, malgré la signature de l’accord de paix de 2015. Depuis, ces attaques se sont étendues dans le centre et dans le sud et le phénomène gagne les pays voisins, en particulier le Burkina Faso et le Niger.