Lors d’investigations de la police sur le sous-marin « Nautilus », à Copenhague, le 14 août. / MOGENS FLINDT/AP

Depuis le 10 août et la disparition de la journaliste suédoise Kim Wall, 30 ans, chaque jour apporte son lot de nouveaux détails sordides, dans une enquête au scénario digne d’un polar sur les bords de la mer Baltique. Jeudi 24 août, la police danoise a lancé un appel : elle recherche les vêtements et le sac de la jeune femme, qui n’ont pas encore été localisés. La veille, les enquêteurs avaient confirmé que le torse, retrouvé dans la baie de Koge, au sud-est de la capitale Copenhague, deux jours plus tôt, était bien celui de la journaliste, dont le corps a été démembré, puis lesté de métal, pour l’empêcher de remonter à la surface.

Au vu de ces nouvelles informations, le procureur spécial de la police de Copenhague, Jakob Buch-Jepsen, a fait savoir qu’il allait demander la requalification des poursuites contre l’inventeur Peter Madsen, 56 ans, déjà inculpé pour « homicide involontaire par négligence » le 12 août. Le parquet semble désormais privilégier la thèse du meurtre, même si le Danois maintient sa version des faits, clamant que la jeune femme est morte à la suite d’un accident et que, paniqué, il a jeté son corps à la mer.

Journaliste indépendante chevronnée, en partance pour Pékin, où elle allait s’installer avec son compagnon, Kim Wall avait profité d’un passage dans le sud de la Suède, d’où elle était originaire, pour rencontrer l’inventeur, dont elle voulait dresser le portrait. Aux enquêteurs, Peter Madsen a d’abord affirmé qu’il l’avait ramenée à terre, en fin d’après-midi, le 10 août, après une sortie à bord de son sous-marin, le Nautilus, qu’il est désormais soupçonné d’avoir sabordé.

« Rocket Madsen »

Placé en détention provisoire, Madsen va subir, dans les prochains jours, une expertise psychiatrique, qui devrait permettre d’y voir un peu plus clair dans la personnalité complexe de cet homme qui fascine, en Suède comme au Danemark. Génie épris de liberté ou dangereux psychopathe ? Le journaliste Thomas Djursing, qui lui a consacré une biographie en 2014, fait de lui le portrait d’un passionné, un brin « poétique », qui « tient plus de l’artiste qui invente des histoires que des machines ». Mais un homme, aussi, dévoré par sa passion, incapable du moindre compromis, dont la carrière est émaillée de conflits.

Autodidacte, il a construit trois sous-marins, dont le Nautilus, qui, avec ses 18 mètres de long et 40 tonnes, est devenu en 2008 le plus grand submersible artisanal du monde. Après l’exploration des profondeurs, Madsen s’était lancé à la conquête de l’espace et rêvait d’embarquer à bord du premier vol habité privé du monde, ce qui lui a valu le surnom de « Rocket Madsen ».

Choqués, ses proches assurent qu’il n’a jamais fait preuve de violence. Selon son avocat, il serait même « soulagé » qu’une partie du corps de la jeune femme ait été retrouvé, afin que la vérité puisse être établie.