Le succès était étonnament rapide. A la fin d’août, un roman s’est hissé du premier coup à la première place du classement des ventes établi par le New York Times dans la catégorie young adult : Handbook for Mortals, un roman de Lani Sarem tout juste publié. Un succès d’autant plus surprenant qu’il s’agit d’un premier roman – Lani Sarem est une jeune actrice qui a également encadré un groupe de rock – et que sa maison d’édition, une société appelée GeekNation, vient tout juste de se lancer dans la publication de romans.

Rien d’impossible, pourtant. Mais le roman ne semble pas non plus avoir bénéficié d’un gigantesque bouche-à-oreille, qui aurait pu expliquer un succès commercial aussi rapide : sa page Facebook ne compte que 1 500 abonnés, il n’a même pas de page Wikipedia, et l’outil Tendances de Google, qui permet d’estimer grossièrement l’intérêt pour une œuvre, ne montre aucun pic d’activité jusqu’à l’arrivée de Handbook for Mortals en tête de la liste des best-sellers du New York Times.

Commandes en gros

Surpris – et agacés –, plusieurs auteurs de romans ont alors décidé de mener l’enquête. En contactant plusieurs librairies, ils ont découvert que des commandes en gros avaient été passées dans plusieurs magasins participant au classement du New York Times. Pour établir sa liste des ventes, le quotidien américain s’appuie sur un échantillon de librairies « représentatives » dans tout le pays – ce sont les ventes effectuées dans les magasins de ce panel qui servent à établir son classement.

Or plusieurs commandes d’importants volumes de Handbook for Mortals ont été passées ces dernières semaines, par téléphone, par des personnes se présentant comme des organisateurs de conférences ou comme le réalisateur d’une adaptation cinématographique du livre. Une adaptation semble bel et bien prévue, avec, dans le rôle principal… Lani Sarem, l’auteure du roman.

Ce 24 août, face à l’avalanche de témoignages, le New York Times a pris la décision de retirer Handbook for Mortals de son classement. Qu’il y ait eu ou non fraude organisée, les livres commandés n’étant pas en stock – le roman est déjà épuisé – le quotidien a estimé qu’il n’était pas possible de prendre en compte les commandes passées par téléphone. Le roman d’Angie Thomas, The Hate U Give, a donc repris la première place du classement.

Lani Sarem a, de son côté, affirmé qu’il n’y avait « à [sa] connaissance » pas eu de tentatives de gonfler les ventes de son roman. Dans l’intervalle, le groupe de rock pour lequel elle avait travaillé avait expliqué l’avoir licenciée « pour avoir fait ce genre de trucs ».