Emmanuel Macron en compagnie de Mahamadou Issoufou, président du Niger (à gauche) et Idriss Deby, président du Tchad, lors du sommet sur les migrants à l'Elysée le 28 août. / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE

« Ce ne sera ni un nouveau think tank, ni un fan-club africain du président de la République », jure l’Elysée. Annoncé mardi 29 août lors de la conférence des ambassadeurs, le Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA) aura pour mission de nourrir la politique africaine d’Emmanuel Macron, de lui faire remonter des propositions et redescendre la perception de sa politique sur le continent.

« Un esprit de hussards »

Directement rattachée au chef de l’Etat, cette structure a été pensée depuis le mois d’avril pour incarner « le renouvellement du partenariat entre la France et l’Afrique », voulu par M. Macron, et permettre « une nouvelle approche des enjeux de société ». « Notre projet est de ne pas faire que du sécuritaire et du contrôle des migrations », insiste l’un des conseillers du président.

« Nous devons avoir un esprit de hussards, être en mode vigie ce que les institutionnels ne savent ou ne peuvent plus faire », promet le franco-béninois Jules-Armand Aniambossou. Camarade de promotion d’Emmanuel Macron à l’Ecole nationale d’administration (ENA), passé par la préfectorale française avant d’être nommé ambassadeur du Bénin en France, l’actuel directeur général Afrique du groupe Duval aura pour mission au sein de cette équipe d’assurer la coordination. Composé de onze membres, tous bénévoles, ce CPA réunit des profils venus d’horizons divers mais le plus souvent issus de la diaspora. En effet, difficile de trouver des points de convergence dans les parcours de l’ancien footballeur Jean-Marc Adjovi-Boco, la directrice adjointe du développement international du groupe Suez, Diane Binder, l’avocat Yves-Justice Djimi, la scientifique kényane Yvonne Mburu, l’innovateur Karim Sy, basé à Dakar ou l’entrepreneuse sociale franco-tunisienne Sarah Toumi.

« Tous sont investis dans la relation entre la France, l’Europe et l’Afrique. Nous n’avons pas voulu faire de répartition en fonction des origines géographiques mais en revanche nous avons respecté une égale répartition entre hommes et femmes », rétorque-t-on dans l’entourage du chef de l’Etat, tout en reconnaissant la volonté de donner « un signal générationnel » : « On n’a pas fait de jeunisme mais quand même un peu », admet l’Elysée.

Accès direct à l’Elysée

Même si la présidence et le ministère des affaires étrangères sont à la base de « cette intuition politique transformée en structure institutionnalisée », ce CPA, constitué de personnalités « qui ne sont pas connues pour grenouiller dans les cercles du pouvoir », devrait inévitablement empiéter sur les plates-bandes de Franck Paris, le « Monsieur Afrique » d’Emmanuel Macron, fraîchement installé dans les fameux bureaux du 2 rue de l’Elysée.

Le conseil, qui aura un accès direct au président, sera sollicité avant chaque déplacement du chef de l’Etat sur le continent. Sa première mission sera de préparer le discours d’Emmanuel Macron dessinant les grandes lignes de la politique française en Afrique. De bonne source, il devrait être prononcé mi novembre, à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso.

A plus long terme, « il s’agira de faire de la coproduction avec les partenaires africains sur des sujets d’intérêt partagé, avec une ambition continentale et pas seulement limitée aux francophones », avance Jules-Armand Aniambossou. L’un des premiers thèmes abordés pourrait être la mobilité. Alors que l’Europe s’échine à bloquer les arrivées sur son sol, « il faut faire respirer les flux, considère ce dernier. Il ne s’agit pas d’ouvrir les vannes mais d’offrir une respiration aux entrepreneurs, créateurs qui veulent se rendre en France et pour qui obtenir un visa c’est la croix et la bannière. » Des frictions avec d’autres administrations sont à attendre mais M. Aniambossou n’y voit aucune raison d’être inquiet. « Tout le monde court vers l’Afrique. Nous avons une proximité qu’il faut savoir utiliser. A nous d’expliquer pourquoi avec la France ce sera mieux qu’avec d’autres », dit-il. Plus modeste, une autre source proche d’Emmanuel Macron avance que l’objectif de ce Conseil présidentiel pour l’Afrique est de « retrouver des canaux de discussion avec cette réalité africaine que l’on a un peu perdue de vue ces dernières années. »

La liste complète des membres du Conseil présidentiel pour l’Afrique : Jean-Marc Adjovi-Boco, Franco-Béninois, 54 ans, ancien sportif et entrepreneur ; Jules-Armand Aniambossou, Franco-Béninois, 55 ans, directeur général Afrique et Outre-Mer du groupe Duval ; Diane Binder, Française, 37 ans, directrice adjointe du développement international du groupe Suez ; Yves-Justice Djimi, Français, 36 ans, avocat ; Liz Gomis, Française, 36 ans, journaliste et réalisatrice ; Jeremy Hadjenberg, Français, 43 ans, directeur général adjoint chez I & P ; Yvonne Mburu, Kényane, chercheuse et consultante en santé ; Vanessa Moungar, Franco-Tchadienne, 33 ans, directrice genre, femmes et société civile à la Banque africaine de développement ; Nomaza Nongqunga Coupez, Sud-Africaine, 36 ans, entrepreneuse dans la culture ; Karim Sy, Franco-Libano-Malien, 49 ans, entrepreneur dans le numérique ; Sarah Toumi, Franco-Tunisienne, 30 ans, entrepreneuse.