Agnès Buzyn, le 5 juillet 2017. / THOMAS SAMSON / AFP

La ministre de la santé, Agnès Buzyn, a tenté, mercredi 6 septembre, de rassurer les trois millions de personnes qui prennent du Levothyrox, un médicament qui vise à corriger notamment l’hypothyroïdie (manque d’hormones thyroïdiennes). Elle a tenu un point presse après avoir reçu des associations de patients, dont l’association Vivre sans thyroïde.

Depuis le changement de formule du médicament, à la fin du mois de mars, de nombreux patients se plaignent de symptômes gênants, voire très gênants. Fatigues, vertiges, troubles de la concentration, douleurs, palpitations… qui empêchent parfois de mener une vie normale. « Ce sont des effets notables, mais qui ne mettent pas en danger la vie des patients », a dit Agnès Buzyn. « Nous avons largement entendu les souffrances des patients, mais je veux les rassurer, le Levothyrox ne met pas en danger », a-t-elle assuré, les priant de ne pas arrêter leur traitement.

A ce jour, plus de cinq mille signalements liés au Lévothyrox — un chiffre très important — ont été effectués sur le portail Signalement-santé du gouvernement, qui permet aux patients et aux professionnels de santé de déclarer tout effet indésirable rencontré avec un médicament. Ces effets indésirables sont traités par les centres de pharmacovigilance, qui sont débordés. « Aucun cas grave n’a à ce jour été signalé », a assuré Dominique Martin, directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), mercredi 6 septembre, alors que Le Figaro mentionnait mercredi au moins quinze cents cas graves (comme des vertiges avec chute et des troubles du rythme cardiaque). Un chiffre non confirmé mercredi par la ministre. Une enquête de pharmacovigilance est en cours, dont les premiers résultats devraient être connus en octobre. Pour l’heure, l’explosion de ces effets indésirables n’a pas trouvé d’explication satisfaisante.

« C’est une crise liée à un défaut d’information et à un défaut d’accompagnement »

« La nouvelle formule est beaucoup plus stable que la précédente », a dit avec insistance la ministre, qui ne reviendra pas en arrière. Le laboratoire Merck a également dit à l’Agence France-Presse mercredi qu’il excluait de revenir à l’ancienne formule de ce médicament. Une pétition, lancée le 24 juin et demandant le retour à la formule précédente, a dépassé mercredi les deux cent mille signatures. L’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) a saisi l’ANSM pour que cette nouvelle formule soit arrêtée, et une manifestation est prévue vendredi 8 septembre. L’actrice Anny Duperey, qui a dit dans une interview au Parisien être victime de ces symptômes, s’est faite la porte-parole de ces patients.

C’est en mars 2012 que l’ANSM a demandé au laboratoire Merck d’améliorer la formule du Levothyrox, prescrit pour 80 % à des femmes, afin que le médicament soit plus stable. Le principe actif, la lévothyroxine, est resté le même. Le lactose, excipient à effet notoire pouvant entraîner des intolérances, a été remplacé par le mannitol et l’acide citrique, très utilisé dans les médicaments et dans les aliments.

En attendant, s’il ne s'agit pas, selon la ministre de la santé, d’un scandale sanitaire, « c’est une crise liée à un défaut d’information et à un défaut d’accompagnement, qu’il faut entendre », mais il n’y a « pas de faute, pas de fraude », a-t-elle dit. Pour que l’information circule mieux, Mme Buzyn a annoncé le lancement prochain d’une mission « pour mieux informer les patients sur les médicaments et apaiser le débat ». Car il y a, selon elle, « un sentiment permanent de complotisme dès lors que l’on parle du médicament », alimenté par des réseaux sociaux.

Inquiets, de nombreux patients se sont tournés vers la L-Thyroxine, une solution en gouttes. Ne représentant jusqu’alors que 1 % des ventes, elle est essentiellement destinée aux enfants de moins de 8 ans et aux personnes souffrant de troubles de la déglutition. Des patients se sont vu refuser ce médicament. Mais cette formule doit être réservée en priorité aux personnes ne pouvant pas prendre de comprimés. Craignant une rupture de stock, l’ANSM a demandé au laboratoire Serb d’augmenter sa production.

Le Collège de la médecine générale, association regroupant des médecins généralistes, s’inquiète de son côté de ce « vent de panique » qu’il juge « injustifié » et qui pourrait inciter les patients à arrêter leur traitement.