Mariano Rajoy est d’accord avec son adversaire, le socialiste Pedro Sanchez : le peuple espagnol tout entier doit décider de l’avenir de la Catalogne. / Francisco Seco / AP

C’était attendu. La Cour constitutionnelle espagnole a suspendu jeudi 7 septembre la loi sur la tenue d’un référendum portant sur l’indépendance en Catalogne, le temps pour les juges d’examiner la constitutionnalité du texte adopté mercredi par le Parlement catalan. Cette loi instaure un « régime juridique exceptionnel » prévalant sur toutes les normes qui pourraient entrer en conflit avec elle, un défi sans précédent à l’autorité de Madrid.

Mariano Rajoy, le chef du gouvernement espagnol en place depuis 2011, avait prévenu quelques heures plus tôt qu’« Il n’y aura[it] pas de référendum d’autodétermination ».

Le conseil des ministres réuni en urgence a demandé à la Cour constitutionnelle d’annuler les textes adoptés mercredi par le parlement catalan pour organiser le référendum, dont le principe avait été déclaré anticonstitutionnel dès 2014. Les autorités catalanes ont jusqu’à présent passé outre les décisions de la Cour dont elles ne reconnaissent plus la légitimité.

Les maires invités à bloquer les initiatives liées au référendum

« Ce serait retirer aux autres Espagnols le droit de décider de leur avenir », a expliqué dans un discours le leader du Parti populaire (droite), précisant que la Constitution pouvait être modifiée mais en passant par les canaux établis et « jamais à travers la désobéissance ».

M. Rajoy a aussi appelé les nationalistes catalans à cesser « l’escalade politique ». Adopté à l’issue d’une session houleuse, le texte précise que si le « oui » l’emporte le 1er octobre, la Catalogne proclamera son indépendance dans les 48 heures. Le président de l’exécutif autonome de la Généralité de Catalogne, Carles Puigdemont, a assuré que le résultat de cette consultation s’imposerait quelle que soit la participation électorale.

Tout sera fait pour empêcher la tenue du référendum a promis le chef du gouvernement, insistant sur le fait que les maires de Catalogne avaient obligation de bloquer toute initiative liée à ce référendum.

Pedro Sanchez, le chef du Parti socialiste, a rencontré dans la journée son adversaire politique mais a annoncé se placer « aux côtés du gouvernement » sur ce dossier. Rien que sur le plan économique, l’indépendance de la Catalogne serait un tremblement de terre majeur pour le pays. Avec 7,5 millions d’habitants, la province représente 20% du PIB espagnol.

L’avertissement du Parlement européen

A Barcelone, le porte-parole du gouvernement catalan, Jordi Turull, a dénoncé un « état de siège latent » imposé à la région mais a assuré que les séparatistes ne se laisseraient pas impressionner par la « pluie de plaintes en justice » et tiendraient le référendum coûte que coûte.

Majoritaires au Parlement catalan depuis septembre 2015, les séparatistes devaient même examiner jeudi une deuxième loi controversée, censée organiser la transition vers un Etat indépendant en cas de victoire du « oui ».

La région reste partagée: à la question « Voulez-vous que la Catalogne devienne un Etat indépendant », 41,1% des Catalans ont répondu « oui » en juin, 49,9% « non », selon le baromètre du Centre d’études d’opinion catalan. Sur Twitter, Ada Colau, la maire de Barcelone, s’est dite prête à « faciliter la participer à toute mobilisation démocratique, sans mettre en péril l’institution ni les fonctionnaires ».

Le président du Parlement européen, l’Italien Antonio Tajani a indiqué dans un courrier à une eurodéputée qu’une Catalogne indépendante resterait en dehors de l’Union européenne et fait valoir que « toute action contre la Constitution d’un Etat membre est une action contre le cadre légal de l’UE ».