Le Daily Mirror publiait encore à 1,5 million d’exemplaires par jour il y a dix ans. Il est tombé à 625 000. / DANIEL SORABJI / AFP

Normalement, les deux journaux devraient être à couteaux tirés. D’un côté, se trouve le Daily Mirror, tabloïd britannique de gauche, qui se veut moyen de gamme et n’a pas complètement renoncé à fournir parfois de vraies informations dans ses colonnes. Il s’oppose au Brexit, malgré une certaine ambivalence. De l’autre, il y a le Daily Express, un tabloïd qui flirte avec l’extrême droite, le plus tonitruant des journaux pro-Brexit. Son emblème, imprimé à la « une », proclame son patriotisme : un valeureux saint Georges, le saint patron anglais, tenant à la main sa lance.

Vendredi 8 septembre, Trinity Mirror, le groupe propriétaire du Daily Mirror, a annoncé être en discussion pour acheter les journaux de Northern & Shell, qui, outre le Daily Express, comprennent les magazines à ragots OK !, New !, Star et le tabloïd Daily Star (qui a renoncé depuis longtemps à l’information et fait dans le porno soft et les bulletins météo). Le projet d’acquisition vient rappeler que tout ça relève avant tout du produit marketing, et que le contenu importe peu à ses propriétaires.

Sévère crise économique du secteur

Le rapprochement est une réaction à la sévère crise économique des tabloïds. Le Daily Mirror publiait encore à 1,5 million d’exemplaires par jour il y a dix ans ; il est tombé à 625 000. Le Daily Express a suivi la même chute, de 830 000 à 380 000 exemplaires.

L’annonce n’est pas vraiment une surprise. Richard Desmond, le propriétaire du Daily Express, voulait se débarrasser de ses journaux depuis quelque temps. L’homme est un propriétaire comme on n’en fait plus. Il a fait fortune avec la version britannique de Penthouse, puis en lançant des magazines et des chaînes de télévision pornographiques. En 2000, il s’est acheté une respectabilité en acquérant le Daily Express, ce qu’il peut se permettre : sa fortune est estimée par le Sunday Times à 2,2 milliards de livres (2,4 milliards d’euros). Mais, depuis quelques années, il montrait moins d’intérêt pour son groupe, assistant rarement aux réunions pour préparer les manchettes de ses journaux. La vente, si elle aboutit, marquera la fin d’une époque.