La baisse de 5 euros des allocations logement, annoncée en juillet, a laissé l’impression que le gouvernement s’en prenait aux plus pauvres. C’est sans doute pour dissiper ce malaise que le président de la République a décidé de se rendre à Toulouse, lundi 11 septembre, à la rencontre de résidents en centres d’hébergement d’urgence. Avec plus de 20 000 demandes de logement social non satisfaites et une situation catastrophique pour les sans-abri, puisque 80 % à 90 % des appels au 115, le Samu social, restent sans solution, la préfecture de Haute-Garonne était bien choisie.

Interpellé lors d’un bain de foule, place du Capitole, par Paul du Bary, qui s’est présenté comme militant local de l’association Droit au logement (DAL), Emmanuel Macron a pris le temps d’exposer les principes de sa politique d’accueil des SDF, inspirée du modèle finlandais. Il s’agit de « sortir d’une logique de traitement d’urgence où l’on met les gens dans des chambres d’hôtel qui coûtent cher, et l’on va plutôt essayer de les mettre dans des pensions de famille, du logement plus durable, et mobiliser tout le monde ».

M. Macron concrétise sa promesse de campagne : créer 50 000 places nouvelles « pour sortir 100 000 Françaises et Français d’un logement très précaire, les mettre vraiment dans un parcours, et avoir, aussi, plus de travailleurs sociaux ». Il a aussi annoncé une hausse de 10 % du budget du logement d’urgence et la création, dès 2018, de 40 000 logements très sociaux de plus, dans treize agglomérations.

« Donnant-donnant »

Le président a aussi pris le temps de détailler sa politique du logement, voulue « globale ». « Nous allons faire baisser les prix dans le parc social, avoir un effort davantage tourné vers le parc HLM, (…) et construire davantage dans le parc intermédiaire et dans le [secteur] libre, dans les zones tendues, pour que nous puissions sortir les Françaises et les Français du logement social lorsque [leurs revenus] dépassent les plafonds », a indiqué le chef de l’Etat.

M. Macron a donc confirmé ce que les organismes HLM craignaient : leur mise à contribution par une perte de recettes qui pourrait aller jusqu’à 50 euros en moins par logement et par mois, selon le souhait du ministère de l’économie, permettant à l’Etat d’économiser 1,5 milliard d’euros sur les aides au logement.

« Baisser uniformément les loyers des 2,5 millions de locataires HLM percevant l’APL, cela n’a pas de sens, soutient Frédéric Paul, délégué général de l’Union sociale pour l’habitat, qui fédère les 750 bailleurs sociaux de France. Il y a des loyers trop élevés que l’on peut baisser, ceux des immeubles construits dans les années 1980, dans les villes nouvelles, de grands logements, coûteux en charges, éloignés des transports et qui occasionnent un taux d’effort des locataires trop élevé. Mais pas ceux, déjà très bas, d’immeubles amortis et bien situés. »

Les organismes HLM, qui perçoivent à eux tous quelque 20 milliards d’euros de loyers par an, seront conduits à piocher dans leur trésorerie, de 7 milliards d’euros, soit à peine quelques mois de fonctionnement, au risque d’assécher leur capacité d’investissement. Or, de l’investissement, il en faudra pour construire les logements très sociaux et intermédiaires promis. M. Macron a laissé entendre qu’il y aurait du « donnant-donnant » avec le mouvement HLM, peut-être en laissant aux organismes la liberté de réévaluer les sur-loyers perçus auprès de leurs locataires les plus aisés.

A la suggestion du militant de DAL d’étendre au niveau national l’encadrement des loyers privés tel que pratiqué à Paris et Lille, le président de la République a rétorqué : « Ce n’est pas une bonne méthode si vous voulez faire un choc d’offre. Moi je n’y crois pas, à titre personnel, parce que vous n’allez pas convaincre les gens de construire massivement des logements si vous bloquez toujours les loyers. » Le détail des mesures de la future stratégie logement sera présenté lors d’un prochain conseil des ministres, quelques jours plus tard que prévu à cause du voyage présidentiel sur l’île de Saint-Martin.