Au meeting de lancement de la campagne référendaire pour l’autodétermination de la Catalogne, le 14 septembre à Tarragone. / Emilio Morenatti / AP

Rien ne semble ébranler la volonté des indépendantistes de voter, le 1er octobre, lors du référendum unilatéral d’autodétermination organisé par le gouvernement de Catalogne. Ni l’offensive judiciaire de Madrid et la mise en examen de ceux qui participent à son organisation, ni le manque de garanties légales d’un scrutin organisé sans tenir compte de la Constitution espagnole n’ont altéré la capacité de mobilisation des séparatistes. Près de 8 000 personnes ont assisté, jeudi 14 septembre au soir, à Tarragone, au lancement officiel de la campagne en faveur du « oui », tandis que plusieurs centaines de personnes sont restées dehors, par manque de place.

Les slogans « Indépendance », « Nous voterons » ou « Nous n’avons pas peur » résonnent dans le Tarraco Arena, les anciennes arènes de cette cité du sud de la Catalogne. Sur l’estrade, les principaux dirigeants politiques ainsi que les présidents de deux associations indépendantistes qui ont organisé l’événement, l’Assemblée nationale catalane (ANC) et Omnium Cultural, brossent un tableau idyllique de la prochaine République catalane tout en multipliant les attaques contre Madrid, parfois avec une ironie mordante.

« Leur monde qui s’effondre »

« Où sont les bulletins ? », chantent-ils en chœur pour se moquer des perquisitions menées par la garde civile pour trouver l’endroit où sont cachés les bulletins de vote. « Bienvenue dans le groupe des accusés », lance Carles Puigdemont, président de la Généralité, à l’adresse des présidents de l’Association des municipalités pour l’indépendance, Neus Lloveras, et de l’Association des mairies catalanes, Miquel Buch, que le parquet a mis en examen dans la journée pour leur implication dans l’organisation du référendum.

« C’est du néofranquisme », tranche Antoni Castella, député régional indépendantiste, provoquant des sifflets sonores contre le gouvernement espagnol. « Ils ont levé le masque », lance-t-il à la foule. « Tout ce bruit médiatique, judiciaire, militaire, policier qui menace est le bruit de leur monde qui s’effondre », affirme le dirigeant de la formation anticapitaliste et d’extrême gauche CUP, Quim Arrufat. A plusieurs reprises, la foule scande « Ballesteros, démission », en référence au maire socialiste de la ville, Josep Fèlix Ballesteros, qui a refusé de céder des locaux municipaux pour le scrutin jugé illégal par la Cour constitutionnelle.

« Grâce à la mobilisation de tous, le président de la Commission européenne a dit que si nous votons oui, ils devront reconnaître la République », assure au public le vice-président du gouvernement catalan, Oriol Junqueras, de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), provoquant de vifs applaudissements. Il fait ainsi référence à une déclaration de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission, à des youtubeurs sur Euronews, diffusée plus tôt dans la journée, que la Commission s’est empressée de rectifier en précisant qu’il s’agissait du cas où le référendum serait légal et approuvé par Madrid, ce qui n’est pas le cas, et qu’il faut « respecter les décisions de la Cour constitutionnelle espagnole ».

« Que va faire la police ? »

Pour les Catalans, très majoritairement europhiles, le maintien dans l’Union européenne est un thème cher, raison pour laquelle les indépendantistes assurent vouloir rester dans l’Union européenne. « L’Europe ne veut pas que la Catalogne sorte de l’UE », assure José Maria Pallisé, électricien venu de Cambrils avec sa famille, reprenant un argument récurrent des indépendantistes. Et d’ajouter : « Quand nous serons indépendants, nous ne resterons pas longtemps en dehors des institutions européennes. »

Sa foi est inébranlable : « Nous aurons un pays nouveau, sans les pressions de l’Espagne. Nous pourrons enfin gérer nos impôts et être à la pointe de l’Europe. Nous vivrons mieux. » Pour lui, les autorités madrilènes, qui ont annoncé un peu plus tôt que la Poste espagnole saisira le courrier électoral, ne pourront pas entraver le vote : « Quand la masse des gens sera devant les bureaux de vote, que va faire la police ? Nous empêcher de passer pour mettre un bulletin dans une urne en nous pointant avec une mitraillette ? »