Laurent Hénart, président du Parti radical valoisien, à Paris, le 12 octobre. / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Le plus vieux parti de France est en passe de renaître de ses cendres. Pour la première fois depuis quarante-cinq ans, le Parti radical de gauche (PRG) et ses cousins de centre droit, les valoisiens – du nom du siège historique du Parti radical –, organisent une université d’été commune samedi 16 et dimanche 17 septembre, à Montpellier. L’occasion pour les adhérents et les élus de ces deux partis de se rencontrer et de pouvoir échanger. Un premier pas dans leur rapprochement qui devrait se concrétiser le 9 décembre lors d’un congrès de refondation à Paris. « Il y a entre nous un socle commun qui est resté le même : nous sommes des républicains et des Européens convaincus, la laïcité et la liberté d’entreprendre sont au fondement de nos idées », explique Sylvia Pinel, présidente du PRG.

Un constat qui ne date pas d’hier. En quarante-cinq ans de scission, il y a bien eu des tentatives de rapprochement, en vain. L’un et l’autre hésitant perpétuellement à s’affranchir de leurs amarres politiques. L’élection d’Emmanuel Macron a tout changé en reléguant au second plan les partis traditionnels. Obligeant les uns et les autres à se réinventer pour convaincre, à nouveau, des électeurs touchés par la désillusion. « Les valoisiens ont été dominés par l’UMP, le PRG par le PS. Il y a une frustration pendant ces quarante-cinq ans de séparation. Cette unification est l’occasion de retrouver une place centrale au cœur de l’échiquier politique : ni à droite ni à gauche », affirme Laurent Hénart, président du Parti radical valoisien. L’ambition n’est pas simplement de se renouveler mais « d’être les premiers à participer à la recomposition du paysage politique », ajoute le maire de Nancy.

Un seul mot d’ordre pour les deux présidents radicaux, « incarner le centre ». Retrouver, aussi, sa grandeur d’antan, perdue depuis la IIIRépublique. Mais les deux partis en sont conscients, le chemin sera long. Mobiliser les militants, rassembler ceux qui ne se retrouvent plus dans le clivage gauche-droite : la partie est loin d’être gagnée – notamment avec l’embouteillage des partis au centre – et cette université d’été commune en est la première manifestation publique.

« Discuter de nos différences »

Sans compter les voix dissidentes qui s’élèvent au sein des deux partis. Du côté des radicaux de gauche, certains cadres préfèrent une reconstitution de la gauche plurielle, formée en 1997 par Lionel Jospin. « Le PRG veut maintenir son radicalisme vers la gauche. Il ne faut pas oublier que les valoisiens appartiennent au groupe des Constructifs [qui comprend des députés Les Républicains ou encore UDI] à l’Assemblée nationale. Ils ont également participé en 2002 à la création de l’UMP avant de s’en séparer en 2011 », rappelle l’ancien ministre et député Roger-Gérard Schwartzenberg, qui souhaite voir s’installer « un dialogue » avant « d’unifier les deux partis ». Preuve que le clivage gauche-droite n’est pas totalement dépassé. Pas de quoi, cependant, en faire uhn obstacle à la refondation des radicaux. « Notre union est loin d’être incompatible, on a 95 % de points communs dans nos programmes. Cette université d’été est aussi l’occasion de discuter de nos différences pour qu’elles soient rassemblées », insiste Sylvia Pinel. Même son de cloche du côté de Laurent Hénart qui ne voit « aucune divergence majeure ».

Quelle place les radicaux pourront-ils occuper dans le champ politique obstrué par Emmanuel Macron et La République en marche ? Les deux présidents se veulent rassurants : le parti sera « libre » et « indépendant ». Pas question d’être rattaché à la majorité présidentielle même s’ils partagent ses orientations économiques. « Nous restons exigeants sur la politique sociale : pour qu’un pays se transforme, il ne doit pas y avoir de sentiment d’injustice. C’est pour cela qu’on s’est engagés dans le débat sur les emplois aidés », rappelle Laurent Hénart. Une union qui permettrait aux radicaux, dans un premier temps, de créer un groupe au Sénat. Puis, « si le projet convainc des députés centristes », d’en constituer un à l’Assemblée nationale, espère Mme Pinel.

Le grand perdant dans cette fusion pourrait bien être l’UDI, dont les valoisiens constituent un socle fondateur. Pour son président, Jean-Christophe Lagarde, l’union des radicaux aurait des « conséquences marginales » puisque « certains membres craignent l’influence du PRG et refusent de quitter l’UDI ». Les radicaux, en fait, sont confrontés à un double enjeu : cesser d’être des forces d’appoint de la droite ou de la gauche et arriver à se frayer une place sur la voie centrale aujourd’hui occupée par La République en marche.