Le camp de Grande-Synthe (Nord), en janvier, avant qu’il ne parte en fumée. / PHILIPPE HUGUEN / AFP

Bientôt, de l’eau, des toilettes et des douches pour les 350 migrants de Grande-Synthe. Lundi 18 septembre, le maire de cette ville de la banlieue de Dunkerque (Nord) qui sert d’étape traditionnelle aux Kurdes avant l’Angleterre, a été reçu par le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb. Damien Carême, qui lui demandait audience depuis le jour de son arrivée Place Beauvau, au mois de mai, s’est vu refuser par le ministre d’Etat de récréer un camp de migrants sur sa commune.

Elu Europe Ecologie-Les Verts (EELV), M. Carême avait été le premier maire de France à créer un camp d’accueil pour les migrants, en mars 2016. Il avait alors ouvert un espace pensé et aménagé avec Médecins sans frontières qui a permis à des centaines de familles kurdes venues d’Irak, de Syrie ou d’Iran de vivre décemment leur attente d’un passage vers la Grande-Bretagne. Avant, un quartier de sa ville les accueillait, ce qu’il avait dénommé lui-même le « camp de la honte ». Jusqu’à deux mille personnes ont en effet campé sous de petites tentes un hiver durant, les pieds dans l’eau et la boue, sur un terrain inondable.

Ce camp, répondant à des normes internationales et installé à la Linière, un autre quartier de la ville, a brûlé en avril, mettant fin à cet accueil dans des cabanes en bois, unique sur le littoral de la mer du Nord. Depuis, quelques centaines d’exilés vivent cachés dans le bois du Puythouck, un espace vert en limite de la commune. Et Damien Carême ne supporte pas les conditions dans lesquelles ils survivent : « Ces gens sont trois cent cinquante aujourd’hui, dont cinquante-six enfants et quarante femmes. Je ne vais pas les laisser passer l’hiver dans la boue », a-t-il expliqué à Gérard Collomb lundi matin. Ce dernier lui refuse de reconstruire de manière permanente un quelconque espace structuré d’accueil, au nom de la crainte qui l’anime que ne se recréent « des points de fixation ».

L’incendie du camp de Grandes-Synthe, dans la nuit du 10 au 11 avril. / PHILIPPE HUGUEN / AFP

Concilier volontés de la mairie et du ministère

L’édile du Nord, qui n’est pas sorti convaincu de ce rendez-vous, a décidé dans la foulée d’engager la mise en place d’installations sanitaires comprenant latrines et douches. « Je ne veux pas être poursuivi en justice comme a pu l’être la ville de Calais. Il est de mon devoir d’élu de me conformer, pour ma commune, au niveau d’équipement qui a été imposé à la ville de Calais par le Conseil d’Etat », expliquait le maire, à l’issue de sa rencontre matinale. A Calais, en effet, un arrêt du Conseil d’Etat a imposé en juillet à l’Etat et à la ville d’installer des points d’eau et des douches. Dix robinets au flux minimal sont à disposition la journée quand les douches se font toujours attendre, deux mois après l’injonction de la plus haute instance de la juridiction administrative.

Comme l’a souligné le ministère, le préfet de région est désormais chargé de trouver un arrangement permettant de réconcilier la volonté du ministère de n’installer aucun camp structuré sur le littoral et la volonté du maire de recevoir humainement et dignement les familles qui survivent sur sa commune. Sous Bernard Cazeneuve, avant que le maire de Grande-Synthe ne prenne la décision de faire cavalier seul, fin 2015, le préfet avait déjà été prié de tenter d’arrondir les angles.