Jimmy Losfeld, président de la FAGE (Fédération des associations générales étudiantes) : « Exclure une partie de la jeunesse des études supérieures est inacceptable »

« La sélection est un mot galvaudé qui ne veut plus rien dire. S’il s’agit d’exclure une partie de la jeunesse des études supérieures, c’est inacceptable compte tenu du chômage actuel et sachant que les emplois de demain seront qualifiés. S’il s’agit de réformer l’affectation entre le lycée et l’université, c’est souhaitable. On se heurte aujourd’hui aux limites du système. Avec le baby-boom de 2000, on va bientôt atteindre les 3 millions d’étudiants. Il faut rendre cohérente la continuité entre le secondaire et le supérieur afin de permettre la hausse du niveau de qualification des nouvelles générations. La FAGE est prête à soutenir des prérequis indicatifs. J’ai le sentiment que l’on peut trouver un consensus car le statu quo est intenable. Un point positif : la ministre a à cœur le dialogue social. C’est fondamental lorsque l’on veut faire une réforme ambitieuse. Mais le sujet qui pourrait coincer est la hausse du budget du supérieur. La FAGE a bien l’intention de peser de tout son poids. »

Lilâ Le Bas, présidente de l’UNEF (Union nationale des étudiants de France) : « La sélection n’est pas la solution, des places supplémentaires sont indispensables »

« Le nombre de bacheliers augmente ainsi que ceux voulant poursuivre des études supérieures. Or en face, les moyens des universités et leurs capacités d’accueil ne suivent pas. Soit on permet à la jeune génération d’être qualifiée et d’accéder au supérieur, soit on fait le choix de sélectionner. La sélection n’est pas la solution. Nous sommes contre le fait que l’université devienne un temple sélectif où l’on trie les étudiants à l’entrée et où l’on fait réussir toujours les mêmes, qui ont déjà réussi tout leur parcours scolaire. Face aux prérequis et au “contrat de réussite étudiant”, nous sommes prudents. Il faut revoir l’organisation du supérieur, notamment le premier cycle universitaire. La licence doit être davantage pluridisciplinaire, avec une spécialisation progressive. Mais si l’objectif est de sélectionner, ça ne passera pas. Mieux orienter et mieux affecter les étudiants ne résoudra en rien le problème des places. Des investissements et des places supplémentaires sont indispensables dans le supérieur. »

Olivier Vial, président de l’UNI (Union nationale interuniversitaire) : « Il faut donner la possibilité aux universités de fermer leurs portes »

« De plus en plus d’étudiants choisissent des filières sélectives. Les établissements eux-mêmes les multiplient. Aujourd’hui, on a un début de traduction de ce phénomène dans la parole publique. Pour nous, le choix réside entre une sélection claire, avec des critères les plus justes possibles, et une sélection à l’aveugle, comme elle se pratique déjà par le tirage au sort, par l’échec et l’abandon. Tout le monde se retrouve dans le rejet du tirage au sort. On a l’impression que, pour ne pas fâcher, le gouvernement est en train de créer un écran de fumée : sans mettre en place une réelle sélection, il revient à un processus d’orientation active. Il faut donner la possibilité aux universités de fermer leurs portes. Il est plus généreux de ne pas laisser perdre un an à un étudiant qui n’a pas le niveau. C’est même lui rendre service. Sans parler du coût de l’échec. Il faut du courage politique. Si l’on crée une nouvelle usine à gaz, ce sera encore pire. Nous serons très vigilants. »

Cet article est extrait de notre dossier Universités & Grandes Ecoles sur les nouvelles tendances de l’enseignement supérieur paru dans « le Monde » daté du mercredi 20 septembre 2017.