Dégâts à Petit-Bourg, en Guadeloupe, après le passage de l’ouragan Maria, le 19 septembre 2017. / CEDRICK ISHAM CALVADOS / AFP

Avant d’être frappé coup sur coup par Irma et Maria, l’arc des Antilles (ou les Petites Antilles) n’avait jamais été touché par un ouragan de catégorie 5, selon l’histoire récente de la météorologie – soit une centaine d’années. Généralement, les cyclones se renforcent plus à l’ouest, après être passés sur ces îles, une fois arrivés dans la mer des Caraïbes. En revanche, en une centaine d’années, l’Atlantique Nord a essuyé trente-trois ouragans de catégorie 5, dont onze se sont produits au XXIe siècle. Cette partie du monde a connu à six reprises des saisons marquées par au moins deux cyclones de cette puissance, dont trois fois dans les années 2000 : en 2005, 2007 et 2017.

Comment se forment les ouragans ?

Les cyclones, qualifiés de typhons dans le Pacifique Ouest et d’ouragans dans l’Atlantique et dans le Pacifique Est, sont des perturbations à circulation tourbillonnaire qui prennent forme dans les océans des régions tropicales quand plusieurs conditions sont réunies. Il faut tout d’abord que la température de la surface de la mer soit élevée, c’est-à-dire en général supérieure à 26 ou 27 °C, et qu’il y ait de l’humidité dans l’air. Ensuite, l’atmosphère doit être instable pour favoriser les phénomènes de convection : un courant d’air ascendant se met en place, soulevant des particules des basses couches de l’atmosphère pour les redistribuer en haute altitude, jusqu’au sommet de la troposphère (15 km d’altitude). En condensant, ces particules provoquent des pluies.

Les vents doivent par ailleurs être relativement homogènes de la surface de la mer jusqu’aux sommets nuageux pour permettre au cyclone de se structurer et de se renforcer, et éviter les phénomènes de « cisaillements ». Enfin, l’élément déclencheur est un phénomène de tourbillon de la masse d’air, sous l’effet, entre autres, de la force de Coriolis. Elle tourne dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère Sud et dans le sens inverse dans l’hémisphère Nord. Dans le bassin de l’Atlantique Nord, les cyclones naissent à partir d’ondes tropicales qui se forment sur l’Afrique occidentale et se déplacent d’est en ouest.

Comment se classent-ils et quelle est leur fréquence ?

Quand les vents les plus soutenus ne dépassent pas 63 km/h, on parle de dépression tropicale. Les vents étant faibles, les risques seront induits essentiellement par les pluies fortes, voire intenses. Entre 63 et 117 km/h, on parle de tempête tropicale et on lui attribue un prénom. Si les pluies sont toujours à craindre, les vents commencent eux aussi à faire des dégâts, et avec eux la mer devient dangereuse. On compte en moyenne 80 systèmes de tempêtes par an, dans le monde, selon les variations d’El Niño et de La Niña, qui entraînent des anomalies de températures dans les océans.

Si les vents dépassent le seuil de 117 km/h, c’est alors un cyclone, qui provoque de très nombreux dégâts. Ils sont classés dans 5 catégories sur l’échelle de Saffir-Simpson, en fonction de la force de leurs vents – le seuil pour la catégorie 5 étant de 250 km/h. En 2013, le typhon Haiyan, qui s’est abattu sur les Philippines, avait lancé un débat parmi les spécialistes : certains plaidaient pour l’ajout d’un sixième niveau pour indexer le cyclone dont certaines rafales pointaient à 380 km/h.

Au total, on dénombre en moyenne 45 cyclones tropicaux chaque année, essentiellement dans le nord-ouest du Pacifique, les Caraïbes ou le sud de l’océan Indien. Ils se forment surtout de juin à novembre dans l’hémisphère Nord et de novembre à mars dans l’hémisphère Sud.

Quelles sont les conséquences du réchauffement climatique sur les cyclones ?

Selon les modèles scientifiques les plus précis, le nombre global de cyclones dans le climat futur devrait être stable. Mais, dans le même temps, on s’attend à une hausse des cyclones les plus intenses, qui s’explique notamment par l’augmentation des températures des océans. Des phénomènes plus puissants sont attendus, associés à des pluies plus intenses, d’environ 20 % supérieures aux moyennes actuelles.

La saison est-elle particulièrement active en matière d’ouragans dans l’Atlantique ?

Le bassin Atlantique nord tropical a, pour l’instant, enregistré 13 tempêtes ou ouragans depuis le début de la saison en juin. Il y a déjà eu des saisons cycloniques autant voire plus actives encore. L’année 2005 avait marqué un record avec 26 phénomènes cycloniques dans toute la saison, jusqu’à fin novembre. En moyenne, on tourne autour d’une douzaine. Mais cette fois, la situation est exceptionnelle, selon Météo France, car il est extrêmement rare de connaître quatre cyclones majeurs si rapprochés dans le temps et dans la même région.

Comment les prénoms des ouragans sont-ils choisis ?

Un prénom est beaucoup plus facile à retenir qu’un chiffre ou un terme technique avance l’Organisation météorologique mondiale. Depuis la fin du XVIIIe siècle et jusqu’au début du XXe, les ouragans portaient le nom du saint du jour. En 1953, le bureau météorologique américain baptise les ouragans en reprenant l’alphabet des transmissions (Able, Baker, Charlie…). Ce sont ensuite les prénoms féminins qui sont retenus mais, depuis 1979 et la protestation des féministes américaines, le choix est paritaire, alternant masculin et féminin.

Six listes sont établies (avec des prénoms d’origine américaine, espagnole et française) et sont reprises cycliquement. La liste de 2017 est ainsi identique à celle de 2011, 2005 et 1999. Seuls les noms des cyclones les plus violents et les plus meurtriers sont retirés de ces listes pour ne pas être réutilisés.

Comment sont représentés les différents niveaux d’alerte ?

Aux quatre niveaux de « vigilance météorologique », et quatre couleurs (vert, jaune, orange, rouge), deux autres couleurs ont été ajoutées pour les cyclones. La vigilance violette correspond au niveau le plus élevé et signifie le confinement total : « Ne sortez pas ! ». Le gris, lui, indique, la nécessité d’une vigilance maintenue (« restez prudents »), avec des dangers de coulées de boue, d’inondations, etc., mais permet le déplacement des véhicules de secours et de déblaiement.

Peut-on facilement prévoir les ouragans ?

Les cyclones étant des phénomènes thermodynamiques, leurs évolutions sont précisément suivies, grâce à des modèles météorologiques et des observations satellites. On les repère dès la formation de la dépression et on peut suivre leur transformation en tempête ou typhon. L’élément difficile à prévoir est leur trajectoire précise et leurs changements rapides d’intensité. Les météorologues n’avaient ainsi pas anticipé que Maria double la force de ses vents en 24 heures, de 120 km/h à 240 km/h.