Amélie de Montchalin (au centre), députée La République en Marche de l’Essonne, à l’Assemblée nationale, le 27 juin. / PATRICK KOVARIK / AFP

Dernière ligne droite pour le budget 2018. Le projet de loi de finance (PLF), présenté le 27 septembre, permettra de connaître le détail des mesures fiscales, des dépenses et des économies prévues par le gouvernement pour l’année à venir. Déjà, les députés phosphorent pour tenter d’apporter leur patte au texte lors de la discussion parlementaire, qui débutera mi-octobre.

Dans la majorité d’abord. Accusés d’inexpérience, voire d’amateurisme lors de la session parlementaire de cet été, les députés de La République en marche (LRM) comptent bien peser dans les débats cet automne. A la manœuvre, Amélie de Montchalin, référente déléguée par le groupe LRM à la commission des finances de l’Assemblée nationale, se définit comme « la responsable de l’équilibre politique du texte ». Objectif : caler avec l’exécutif les éléments qui seront mis en avant pour défendre chacune des mesures, mais aussi identifier les « angles morts » du texte.

Ainsi, concernant le prélèvement forfaitaire unique (PFU ou flat tax), « nous demanderons à ce que la flat tax s’applique aussi aux plus-values de cession des actifs professionnels (pour les commerçants, agriculteurs et indépendants) qui sont aujourd’hui imposés à l’impôt sur le revenu », indique au Monde Mme de Montchalin. Il s’agit à la fois de donner des gages aux épargnants et de mettre en avant le financement des entreprises par le capital. « On doit pouvoir dire que toute personne qui investit dans l’économie, soit par son entreprise soit par un produit financier, ne sera pas taxé à plus de 30 % », souligne la députée de l’Essonne.

Séduire les investisseurs

Consciente du pari que représentent des réformes destinées à orienter l’épargne vers l’« économie productive », alors que l’ISF-PME sera supprimé, la majorité parlementaire réfléchit toutefois à « des mesures transitoires pour accompagner ce changement culturel. Cela pourrait prendre la forme d’un renforcement de l’IR-PME [qui permet de déduire de son impôt sur le revenu 18 % de ses investissements dans des PME, dans la limite de 10 000 euros] : on réfléchit à bouger le taux, augmenter le plafond », explique Mme de Montchalin. En contradiction avec l’idée d’une fiscalité stable et lisible vantée par Bercy pour séduire les investisseurs ? « Nous ne voulons pas recréer une niche mais être dans l’accompagnement, en prenant cette mesure pour deux ans maximum », assure-t-elle.

La transformation de l’ISF en impôt sur la fortune immobilière (IFI) suscite aussi de multiples interrogations. La question de la taxation des « signes extérieurs de richesse » (yachts, etc.) reste posée. Gilles Carrez, député Les Républicains du Val-de-Marne, qui souhaitait un temps centrer l’IFI sur l’investissement « productif » en y intégrant les avions privés ou les œuvres d’art, évoque désormais un amendement pour « supprimer l’ISF. » « C’est une réforme de banquier d’affaires, uniquement pour les très riches », martèle l’ancien président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, dont il est toujours membre. Il compte aussi proposer que les revenus fonciers des baux commerciaux pour les particuliers soient soumis à la flat tax. « Lorsque vous êtes propriétaire d’un local artisanal ou commercial que vous louez à un boulanger, il n’y a pas de raison que vous soyez imposés à l’impôt sur le revenu, au-dessus de 30 % », fait-il valoir. « Les loyers obtenus pouvaient entrer dans l’assiette de l’ISF, mais n’entreront pas dans celle de l’IFI », rétorque-t-on à Bercy.

« Nous ne ferons pas de miracles »

Joël Giraud, le rapporteur général (LRM) de la commission des finances, travaille, lui, sur les moyens de pallier la baisse des moyens alloués au service public audiovisuel, notamment par « une réflexion sur la réintroduction de plages publicitaires en soirée ».

Reste le cas des retraités, qui subiront en 2018 l’augmentation de 1,7 point de la CSG. « Nous trouverons une solution afin d’éviter les effets de seuil pour ceux payant le taux réduit de CSG [de 3,8 % au lieu de 6,6 %, sous conditions de revenus] », indique Eric Alauzet, député LRM du Doubs et rapporteur pour le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) à la commission des finances. Il est en revanche moins affirmatif pour les retraités modestes déjà dispensés du paiement de cette taxe, qui ne gagneront donc pas à sa suppression. « Ces dégrèvements dépendent de chaque commune, il est très difficile de savoir combien de personnes sont concernées. Nous ne ferons pas de miracles », précise-t-il, dans un contexte budgétaire tendu. D’autant que les nouveaux seuils d’exonération de taxe d’habitation annoncés par Bercy le 13 septembre sont déjà censés être plus favorables à cette population. « Nous assumons qu’une fraction des retraités les plus aisés seront les contributeurs nets à notre budget », indique de son côté Mme de Montchalin.