Documentaire sur Arte à 20 h 50

Pour l’opinion, la pratique des enlèvements rappelle communément les exactions commises par des groupes islamistes au Sahel, en Irak, en Afghanistan ou en Syrie.

Pourtant, l’essentiel de ces prises d’otages contre rançon se déroule loin de cette zone, en Amérique du Sud et notamment au Venezuela, pays qui en détient le triste record du monde, avec 30 000 victimes par an. Dans ce long documentaire, Rémi Lainé et Dorothée Moisan montrent bien comment ce business des otages est devenu systémique dans ce pays.

Le fil rouge de ce travail est la ­résolution d’un enlèvement, celui de Kenny Cisneros, dont la famille avait été déjà été visée par des prises d’otages. Les auteurs du film nous font suivre les principales étapes de l’enquête par l’intermédiaire d’un conseiller privé appelé par la famille, lui-même ancien chef de la police judiciaire locale. Mais on ne verra rien du travail des autorités elles-mêmes qui ­obtiendront, 39 jours plus tard, la libération de ce jeune homme.

Didactique, le documentaire ­explore les différents aspects de ce business, des assureurs aux négociateurs. Ces intervenants extérieurs ponctionnent, à leur manière, une part de cette manne.

« La Rançon », de Rémi Lainé. / LITTLE BIG STORY

La Lloyd’s a été précurseur pour couvrir ce risque dans le monde mais d’autres compagnies d’assurances vendent désormais le contrat « Kidnap and ransom ». Pour tenir à distance ces vautours, le ­Venezuela, le Brésil, la Colombie, l’Italie et le Portugal ont interdit la vente de ce produit. S’ils protégeaient dans un premier temps les riches étrangers de passage puis les chefs d’entreprise locaux, les assureurs ont élargi leur clientèle aux familles aisées.

Ce business des otages s’est en effet démocratisé mais s’est aussi dégradé. Aujourd’hui, dit l’un des témoins interrogé, « c’est vite fait, mal fait », de petits coups pour de petits montants, mais réitérés. L’intérêt de ce documentaire réside sans conteste dans le portrait du Venezuela qui se dessine en creux. Les enlèvements font florès dans des sociétés où l’absence de classe moyenne dresse brutalement riches contre pauvres.

L’enquête aurait néanmoins ­gagné en intensité et en fluidité si elle était restée concentrée sur l’exemple vénézuélien. Une longue digression sur l’Afrique et sur un enlèvement à la frontière ­libano-syrienne fait perdre de la force et de la cohérence au récit.

La Rançon, de Rémi Lainé (France, 2017, 98 min).