« Qu’on laisse voter les gens », a enjoint Nicola Sturgeon, la première ministre d’Ecosse / RUSSELL CHEYNE / REUTERS

Deux catégories différentes de Britanniques ont nettement manifesté leur « préoccupation » à l’égard des événements de Catalogne, dimanche 1er octobre : les indépendantistes écossais et les Britanniques europhobes.

Les premiers qui, en 2014, ont obtenu du gouvernement de Londres l’organisation d’un référendum sur l’indépendance et l’ont perdu de peu, n’ont jamais caché leur solidarité avec les nationalistes catalans. Les seconds veulent voir dans les violences espagnoles une manifestation du manque de démocratie dans l’Union européenne et une preuve de la supériorité du modèle britannique.

« Qu’on laisse voter les gens », a enjoint Nicola Sturgeon, la première ministre d’Ecosse sur Twitter, appelant l’Espagne à « changer de cap avant que quelqu’un soit sérieusement blessé ». Leader du Parti national écossais (SNP ; indépendantiste), Mme Sturgeon a multiplié les tweets, dimanche, manifestant sa « préoccupation croissante devant les images venues de Catalogne ». « Indépendamment de nos opinions sur l’indépendance, a-t-elle précisé, nous devrions tous condamner les scènes auxquelles nous assistons ».

Logiquement, la réaction officielle du Foreign office a été modérée :

« Le référendum est l’affaire du gouvernement espagnol et du peuple. Nous souhaitons que la loi et la Constitution espagnole soient respectées. L’Espagne est une alliée proche une véritable amie dont la force et l’unité nous importent ».

Alors que les négociations sur le Brexit patinent, Londres ne tient sûrement pas à froisser un gouvernement qu’il présente comme proche politiquement et attaché comme lui à la liberté des échanges commerciaux. Cela n’a pas échappé à Mme Sturgeon qui a trouvé « honteusement faible » la réaction de Boris Johnson. Pour elle, « un véritable ami des Espagnols leur dirait que ce qu’ils ont fait aujourd’hui est mauvais et néfaste ».

Les indépendantistes écossais ne sont pas les seuls sur cette ligne. De façon discrète, le Parti travailliste a estimé « inacceptable la manière excessive avec laquelle les autorités espagnoles ont réagi aux événements par une intervention policière agressive et la fermeture de bureaux de vote par la force ».

Même tonalité chez les Libdems (proeuropéens) : leur chef, a demandé à M. Johnson d’appeler l’ambassadeur d’Espagne pour lui faire part de sa réprobation de l’attitude « inacceptable » de la police. Les images de policiers empêchant un vote passent mal au Royaume-Uni, de même que le principe constitutionnel de l’unité nationale dans ce pays dépourvu de Constitution écrite.

De leur côté, les partisans du Brexit n’ont pas manqué de tirer argument des violences en Catalogne. « C’est terrible que cela arrive dans un pays de l’UE sans la moindre condamnation de Bruxelles ! », s’est indigné Iain Dale, un journaliste europhobe qui interviewait Liam Fox, ministre du commerce extérieur, en ouverture du congrès des tories à Manchester. Plus prudent, M. Fox, lui-même europhobe militant, s’est gardé de paraître faire la leçon à Madrid. Mais il a insisté sur « le droit à l’autodétermination » et rappelé comment Londres avait autrement plus dignement traité les Ecossais. « Nous avons affronté les indépendantistes écossais, s’est-il félicité, et, Dieu merci, nous les avons battus démocratiquement ! »