Cesare Battisti, escorté par les forces de l’ordre au siège de la police fédérale à Corumba, le 5 octobre. / FABIO MARCHI / AFP

L’ex-militant d’extrême gauche italien Cesare Battisti, 62 ans, en détention provisoire au Brésil et dont Rome réclame l’extradition, va être libéré très prochainement, ont annoncé ses avocats tard vendredi 6 octobre.

« Une mesure provisoire d’habeas corpus a été prise » par un tribunal régional « en faveur de la libération immédiate de Battisti », ont fait savoir ses avocats dans un communiqué, précisant être « en train de prendre les mesures nécessaires pour que Battisti soit libéré ce soir ». Ce dernier est détenu depuis deux jours dans un commissariat de la ville de Corumba, située à la frontière avec la Bolivie.

Cette mesure, prise par un juge local, n’exclut toutefois pas de nouveaux rebondissements alors que, selon une source gouvernementale, le Brésil est en train d’évaluer la possibilité d’extrader l’Italien. « Le président [Michel Temer] attend la position du ministère de la justice et du ministère des affaires étrangères pour prendre une décision », a déclaré vendredi à l’Agence France-Presse (AFP) une source du palais présidentiel de Planalto.

Cesare Battisti avait été condamné en 1993 par contumace par la justice de son pays à la réclusion à perpétuité pour quatre meurtres et complicité de meurtres ; les faits remontaient aux années 1970, « années de plomb » en Italie.

« Des indices de blanchiment d’argent »

Mercredi 4 octobre, il a été interpellé lors d’un contrôle de routine à Corumba. Il est soupçonné par le juge brésilien qui a ordonné sa détention d’avoir tenté de fuir le Brésil pour éviter son extradition.

Dans la vidéo de l’audience qui s’est tenue le lendemain et à laquelle l’AFP a eu accès, l’Italien, vêtu d’un polo vert, donne des signes de fatigue et écoute impassible la décision du magistrat, qui évoque des « antécédents gravissimes » pour justifier sa décision. Battisti a été interrogé par téléconférence, le juge qui gérait son dossier se trouvant dans la capitale de l’Etat de Mato Grosso Do Sul, Campo Grande, située à 400 kilomètres.

Le motif de cette interpellation : M. Battisti transportait 6 000 dollars (5 200 euros) et 1 300 euros, une somme supérieure au montant autorisé sans déclaration préalable (2 700 euros).

« Les dépositions recueillies lors de l’enquête renforcent les indices d’une évasion de devises (…) et de blanchiment d’argent », a justifié le juge. Une version niée en bloc par l’accusé lors de l’audience. « Sincèrement Excellence, je ne savais pas qu’avec cette quantité modeste d’argent je commettais un délit. Je n’ai jamais eu l’intention de sortir du pays, a-t-il argumenté en portugais. Je me rendais dans un centre commercial pour acheter entre autres du matériel de pêche, des vestes en cuir et du vin. Je pensais que ce centre commercial se trouvait en zone franche et qu’il n’était pas en Bolivie. Si je l’avais su, je ne l’aurais pas fait. »

Le dernier mot reviendra à la Cour suprême

La dernière demande d’extradition de Battisti remonte au 25 septembre, et, selon les médias italiens, le président Temer s’y est montré favorable. La presse locale abonde dans ce sens : selon le journal O Globo, cette extradition pourrait même intervenir « dans les prochains jours ». Une telle décision irait à l’encontre de celle prise par Luiz Inacio Lula da Silva, qui, au dernier jour de son mandat de président du Brésil, fin 2010, avait refusé d’extrader Battisti vers l’Italie, déclenchant alors la colère de Rome.

L’extradition pourrait toutefois être bloquée par la Cour Suprême, qui a rejeté récemment plusieurs demandes de l’Italie, notamment en 2011, estimant que Rome ne pouvait contester la décision « souveraine » de Lula.