Chaque année, le Festival « off » d’Avignon se transforme en une vaste « foire commerciale », selon le Syndicat national des arts vivants (Synavi) d’Ile-de-France. / BERTRAND LANGLOIS/AFP

Comment, pour une compagnie artistique émergente, montrer ses créations aux programmateurs et diffuseurs sans s’endetter dans la location d’une salle au Festival « off » d’Avignon ? C’est à cette épineuse et lancinante question que va tenter de répondre la première édition de Scènes sur Seine. Ces rencontres artistiques en Ile-de-France associent, du 12 octobre au 3 novembre, vingt compagnies franciliennes, une douzaine de programmateurs et quatre lieux (Le Vent se lève à Paris, Gare au Théâtre à Vitry-sur-Seine, Théâtre de l’Usine à Eragny-sur-Oise, Théâtre Paul Eluard à Bezons) pour présenter une série de spectacles de théâtre, de danse, de conte, de marionnettes ou de cirque sous une grande variété de formats (créations, lectures, maquettes…).

L’idée ? Travailler autrement pour montrer la diversité de la création francilienne, mutualiser les moyens et les coûts, arrêter de… « payer pour jouer ». Cette dernière formule choc fait référence au forum organisé il y a un an par le Syndicat national des arts vivants (Synavi) d’Ile-de-France – organisateur de Scènes sur Seine avec le Réseau des arts vivants (Raviv) – qui faisait le constat de la « foire commerciale » qu’est devenu le Festival « off » d’Avignon. « Foire » dont les grands gagnants demeurent les loueurs de lieux qui réclament aux compagnies plusieurs milliers d’euros pour un créneau de deux heures par jour. Tandis que de leur côté, des comédiens jouent parfois gratuitement en espérant compenser le manque à gagner grâce à des dates de tournée.

« Un vrai cercle vicieux »

Si plusieurs conseils régionaux (Pays de Loire, Champagne-Ardenne, etc) aident certaines de leurs compagnies à participer à ce festival incontournable pour la diffusion théâtrale, ce n’est pas le cas en Ile-de-France. « Mais ces subventions poussent les propriétaires de salles à augmenter leurs tarifs, ce système est un vrai cercle vicieux », constate Jean Quercy, de la compagnie Théâtre Averse. « Nous voulons trouver une alternative à Avignon, créer un “circuit court” car c’est un comble de devoir s’expatrier en Avignon pour rencontrer des programmateurs de notre région », expliquent Emmanuel Landier, de la compagnie Décalages Présents et Nadia Rémita, de la compagnie Nutritive.

Pour Scènes sur Seine, chaque partenaire a joué le jeu : les lieux d’accueil des spectacles mettent gratuitement leur salle à disposition, les programmateurs impliqués promettent d’assister à l’ensemble des spectacles proposés, les compagnies n’ont pas été sélectionnées artistiquement et s’engagent à respecter les droits des artistes. « Le but est de créer des contacts, d’échanger avec les programmateurs et diffuseurs et de montrer notre travail », résume Delphine Lalizout, de la compagnie DemainOnDéménage. « Ce qui est nouveau dans la démarche de Scènes sur Seine, c’est la volonté de plusieurs compagnies de s’organiser et d’agir ensemble », insiste-t-elle. Cette mutualisation a notamment permis aux compagnies d’obtenir, pour cette première édition, un soutien financier de l’Adami et de la Spedidam (Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes).

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Pour l’heure, Scènes sur Seine commence à petite échelle (l’Ile-de-France comptant près de mille compagnies) mais se veut un premier pas vers une forme d’« économie solidaire » pour contrer la « marchandisation du spectacle vivant » de plus en plus en œuvre dans le « off » d’Avignon. Jean Quercy ne s’en cache pas : « Le fond de notre démarche est politique », dit-il.

Scènes sur Seine, jusqu’au 3 novembre. scenessurseine.org