La tempête Ophelia a fait trois morts en Irlande. / BEN STANSALL / AFP

Sixième perturbation majeure de la saison, après Irma, Harvey, Jose… la tempête Ophelia a fait trois morts en Irlande, lundi 16 octobre, et a nourri les feux dévastateurs qui ont tué plus de quarante personnes au Portugal. Ophelia a été, selon Météo France, « le premier ouragan de cette puissance à évoluer aussi près des côtes européennes ».

« Le cœur de l’épisode, c’était hier, maintenant c’est fini », assure Philippe Caroff, responsable des activités opérationnelles du centre des cyclones tropicaux de La Réunion. Pour le météorologue, le phénomène est très rare : « La particularité de cet ouragan est qu’il s’est formé très à l’Est, presque en dehors de la zone tropicale, c’est inhabituel, explique-t-il. Du coup, il est remonté en ligne directe vers l’Irlande, avec un trajet raccourci. »

« Une trajectoire comme ça, un cyclone qui remonte directement vers l’Irlande, je n’en ai jamais vu. Le modèle classique sur les côtes britanniques et irlandaises ce sont des perturbations qui montent vers les Etats-Unis et se terminent chez nous », souligne Christian Dumard, de l’entreprise Great Circle, qui a notamment participé aux bulletins météo du dernier Vendée Globe.

« Cet ouragan a bénéficié de conditions favorables à son développement, et notamment d’eaux plus chaudes que la normale, de plus de deux degrés dans cette partie de l’Atlantique », expliquait Météo France, jeudi 12 octobre.

« Les vents sont restés violents »

Une fois apparu à plus de 1 200 kilomètres au sud-ouest des îles portugaises des Açores, Ophelia « s’est transformé d’une structure tropicale à une structure extra-tropicale », en entrant dans des eaux froides et en se dirigeant vers l’Europe, poursuit M. Caroff. Les ouragans dans les zones tropicales sont, pour leur part, alimentés par l’évaporation des eaux. « Une dépression extra-tropicale n’est plus alimentée par l’eau chaude », explique M. Dumard. Ainsi, Ophelia « s’est ensuite développée comme une tempête classique : avec des affrontements d’air chaud du désert et d’air froid qui descendent des eaux arctiques. »

En avançant dans les eaux froides, Ophelia n’a cependant pas beaucoup faibli, au contraire. « Les vents sont restés violents jusqu’à l’arrivée sur l’Irlande », juge M. Caroff.

« L’arrivée sur des eaux plus froides et des conditions atmosphériques différentes aurait pu l’affaiblir, mais parfois on peut avoir un phénomène qui continue à se développer, c’est ce qu’il s’est passé ici. »

La saison cyclonique s’achève généralement en octobre et novembre, avec un pic en septembre. « Il faut que l’eau soit chaude. Dans l’hémisphère nord, c’est en fin d’été généralement parce que l’eau met du temps à se réchauffer, même s’il y a des risques dès le mois de juin », explique Christian Dumard.

Une saison avec de nombreux phénomènes

Cette année, la saison a été particulièrement chargée en dépressions, avec sept ouragans majeurs sur l’Atlantique nord. Si la température à la surface de l’eau et jusqu’à soixante mètres de profondeur sont des facteurs participant à la formation de dépressions cycloniques, l’effet du réchauffement climatique sur le nombre d’ouragans intenses ne fait pas encore l’unanimité.

Fabrice Chauvin, chercheur au Centre national de recherches météorologiques (CNRS et Météo France), expliquait récemment dans Le Monde qu’il fallait attendre encore dix ou vingt ans pour « détecter des tendances ».

Concernant la formation atypique de l’ouragan Ophelia, M. Dumard veut rappeler que les côtes irlandaises ont connu d’autres épisodes très violents, comme les 15 et 16 octobre 1987, quand une violente tempête a fait de nombreux morts et des dégâts matériels considérables au Royaume-Uni, touchant également la France.