Près de la station de métro Maelbeek de Bruxelles, le lendemain des attentats du 22 mars 2016. / KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Soucieuse de ne pas réduire « l’Europe qui protège » à un simple slogan, la Commission européenne poursuit l’approfondissement de son « Union de la sécurité ». Mercredi 18 octobre, elle a ainsi annoncé le déblocage de 118,5 millions d’euros afin d’aider les pays membres de l’UE à améliorer la protection des espaces publics contre les attentats. La Commission veut aussi soutenir les villes qui investissent dans des projets sécuritaires innovants.

Espérant tirer les leçons de l’attaque du 14 juillet 2016 à Nice, du marché de Noël de Berlin la même année ou de la récente attaque sur les Ramblas de Barcelone, Bruxelles proposera de nouveaux outils pour sensibiliser la population et soutenir des projets qui intégreront, dès leur conception, la notion de sécurité. Un réseau transnational et un forum de praticiens devraient aider à l’échange de bonnes pratiques afin d’améliorer la sécurité des centres commerciaux, des stades ou des salles de concerts. Les pays seront également incités à coopérer pour l’entraînement des forces de surveillance et de secours, la coordination entre police et services médicaux, etc.

Le secteur des transports, ainsi que la menace d’attentats à l’aide de substances chimiques biologiques, radiologiques ou nucléaires (CRBN), font l’objet d’une attention spéciale. Dans ce domaine également, Bruxelles entend favoriser la création d’un réseau européen sous l’égide de Centre européen de la lutte antiterroriste, créé récemment au sein d’Europol, le bureau policier établi à La Haye.

Transactions financières

Ce dernier sera aussi renforcé, avec l’embauche de 90 experts dans le domaine du chiffrement et du cryptage des données. Les membres de réseaux terroristes utilisent de plus en plus ces techniques – censées initialement protéger les données personnelles – pour leurs échanges, ce qui complique la tâche des enquêteurs. La Commission proposera mesures pratiques, formations et expertises, surtout aux pays mal équipés pour affronter ces défis.

La Commission a d’autres projets plus classiques, comme au sujet de la lutte contre le financement du terrorisme, en mettant l’accent contre les obstacles à l’accès aux informations concernant les transactions effectuées dans les Etats membres.

Le collège européen compte également revoir les règles d’accès aux « précurseurs d’explosifs » – substances d’usage courant pouvant servir à la confection de bombes –, notamment en éditant un guide pratique à destination des Etats, pas tous très soucieux de ces questions à l’heure actuelle. Les substances permettant, par exemple, la fabrication de peroxyde d’acétone, ou TATP, peuvent être acquises assez aisément. Cet explosif avait été utilisé entre autres lors des attentats de novembre 2015 à Paris.

Coopération avec des pays tiers

Depuis fin août, la France a déjà durci la réglementation sur l’achat de ces produits chimiques. Les personnes qui souhaitent par exemple se procurer de l’eau oxygénée doivent donner leur identité et indiquer quelle utilisation elles comptent faire de cette substance.

Dernière priorité de la Commission – outre la mise à l’étude d’une hypothétique « unité européenne de renseignement » – : le renforcement de l’action extérieure de la lutte antiterroriste, en améliorant la coopération avec des pays tiers et en négociant des accords sur le transfert de données avec une série d’Etats dont le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Turquie et Israël. Les Européens espèrent aussi renégocier un accord avec le Canada sur l’échange de données concernant les passagers (PNR). Un accord conclu en 2014 a été rejeté en juillet dernier par la Cour de justice européenne, qui l’a jugé incompatible avec le respect des droits fondamentaux.