Des drapeaux catalans et espagnols dans une rue de Barcelone, le 24 octobre. / Emilio Morenatti / AP

Au comble de la tension, la Catalogne était sur le point de déclarer son indépendance jeudi 26 octobre, avec des conséquences incalculables. Et ce, alors que le Sénat à Madrid prévoit de se réunir vendredi pour entériner la mise sous tutelle de la région.

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La présidente du Parlement catalan, l’indépendantiste Carme Forcadell, a ainsi annoncé que son assemblée siégerait à partir de 17 heures. Un timing loin d’avoir été choisi au hasard : au même moment dans la capitale espagnole, une commission sénatoriale de 27 membres commencera à débattre sur la suspension d’autonomie de facto de la Catalogne, demandée par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy.

Un vote acquis à Madrid

Vendredi, la chambre haute devra décider en séance plénière si elle accorde au premier ministre, au titre de l’article 155 de la Constitution, le pouvoir de destituer l’exécutif catalan, la mise sous tutelle de sa police, son Parlement, ses médias publics, pour six mois, le temps d’organiser dans la région des élections qui remettent tout à plat, début 2018.

Ce vote est en principe acquis : les conservateurs disposant d’une confortable majorité. Ils devraient, en outre, pouvoir compter sur le soutien du Parti socialiste et des libéraux du parti Ciudadanos.

Le président de la Généralité Carles Puigdemont avait déjà prévenu le 19 octobre que si le Madrid « continuait à empêcher le dialogue et à poursuivre la répression, le Parlement de Catalogne pourra, s’il l’estime opportun, voter une déclaration formelle d’indépendance ». Mercredi soir, ce dernier a réuni d’urgence son cabinet. Le quotidien La Vanguardia rapportait qu’il penchait pour la rupture, alors que l’exécutif régional serait divisé.

« La seule réponse possible »

La Catalogne, dont les relations avec Madrid n’ont cessé de se dégrader depuis six ans, est au cœur de la plus grave crise politique qu’ait connu l’Espagne depuis le retour à la démocratie en 1977, après la tenue le 1er octobre d’un référendum d’autodétermination non reconnu par le gouvernement espagnol et interdit par la justice. Les deux camps semblent aujourd’hui irréconciliables.

Mercredi matin, M. Rajoy avait refermé tout espoir de pourparlers avec les autorités catalanes : « Vous me dites que les institutions catalanes ont demandé le dialogue et que ma réponse a été l’article 155 et c’est vrai », a-t-il lancé devant le Congrès à un élu indépendantiste. Et d’insister : « c’est la seule réponse possible, la seule. » Carles Puigdemont a riposté en annonçant qu’il n’irait pas s’exprimer devant le Sénat comme celui-ci l’y invitait avant de prendre des mesures de mise sous tutelle de la région.

L’article 155 entraînera une suspension de facto de l’autonomie, restaurée après la fin de la dictature de Francisco Franco (1939-1975) et à laquelle les Catalans tiennent beaucoup. Craignant ce scénario, plusieurs membres de la Généralité se sont exprimés mardi soir contre une déclaration unilatérale d’indépendance et pour des élections régionales anticipées.