La baisse de cinq euros des aides personnalisée au logement (APL) aura bien lieu. Le Conseil d’Etat a rejeté, vendredi 27 octobre, le recours du collectif d’associations « Vive l’APL » contre cette réduction des APL. La mesure, dénoncée par les associations comme une « économie sur le dos des plus pauvres », touche sans distinction 6,5 millions de bénéficiaires depuis le 1er octobre.

Le collectif, qui rassemble 70 organisations de défense des mal-logés, syndicats et bailleurs sociaux, ainsi que plusieurs particuliers bénéficiaires de l’aide, avait demandé, en urgence, la suspension du décret et d’un arrêté du 28 septembre mettant en œuvre cette baisse forfaitaire.

Le Conseil d’Etat a jugé de son côté qu’il n’y avait pas de « doute sérieux quant à la légalité des deux décisions réglementaires contestées [un décret et un arrêté] » et a rejeté la demande du collectif d’associations. Selon le Code de la construction et de l’habitation (article L 351-3), « le montant de l’aide personnalisée au logement est calculé en fonction d’un barème défini par voie réglementaire », a souligné la juridiction administrative.

« Si nous avons perdu une bataille, nous n’avons certainement pas perdu la guerre », a réagi l’avocat des requérants, Patrice Spinosi. Il a rappelé qu’un recours au fond contre ces textes allait être examiné dans les mois à venir.

Colère du secteur du logement social

« On ne peut laisser le gouvernement pour des raisons purement économiques priver d’une aide substantielle les plus faibles et les plus vulnérables de notre société », a déclaré Me Spinosi.

L’annonce de cette baisse de cinq euros des APL en juillet avait provoqué la colère de l’ensemble des associations de lutte contre le mal-logement et du secteur du logement social. La Caisse nationale des allocations familiales et le Conseil national de l’habitat avaient tous deux émis dans la foulée des avis défavorables à ces textes.

Lors de l’audience devant le juge des référés, mercredi 25 octobre, plusieurs requérants étaient venus témoigner d’une « vie de misère », dans laquelle « chaque euro compte ».

« 10 euros pour vivre »

Les mains tremblantes, un jeune surendetté avait expliqué qu’une fois toutes les factures payées il lui restait « 10 euros pour vivre ». Face aux représentants du gouvernement, il avait décrit sa « boule au ventre » quand il se rend compte que « le niveau du liquide vaisselle diminue, qu’il va falloir en racheter », quand il refuse une invitation pour ne pas arriver les mains vides, quand il ne voit pas sa fille, qu’il « ne peut pas inviter à déjeuner de temps en temps ».

Me Spinosi avait plaidé l’humanité contre la logique économique, et chiffré la misère : « 80 % des allocataires des APL touchent moins que le smic », « la moitié des bénéficiaires sont en dessous du seuil de pauvreté », avait-il rappelé.

Le représentant du gouvernement s’est défendu en expliquant que cette réduction avait été « compensée par une hausse du RSA », un « abaissement du seuil de versement » et a demandé que les mesures d’aide de l’Etat soient analysées dans leur cohérence d’ensemble.

Cette baisse de cinq euros des APL est distincte de celle que le gouvernement veut mettre en place dans le seul logement social, en échange d’une baisse des loyers, afin que la mesure n’ait pas d’impact pour les locataires.