Une femme palestinienne en pleurs, devant la morgue de l’hôpital de Deir el-Balah, où sont conservés les morts après l’explosion du tunnel. / MAHMUD HAMS / AFP

Sept Palestiniens ont été tués par l’armée israélienne et une dizaine d’autres blessés, lundi 30 octobre, au cours de la destruction d’un tunnel d’attaque reliant la bande de Gaza à Israël. Son lieu d’origine se situe près de la ville de Khan Younès, au centre du territoire palestinien enclavé. L’armée a annoncé cette opération à la mi-journée, précisant que l’artère souterraine avait été repérée grâce à l’utilisation de nouvelles technologies de pointe. Elle n’a pas directement attribué le creusement de ce tunnel au mouvement islamiste armé, qui contrôle la bande de Gaza depuis 2007. Aucune partie ne souhaite d’escalade militaire, mais la tension est montée soudainement sur place.

L’explosion aurait été déclenchée du côté israélien de la ligne de démarcation, précise l’armée, non loin du kibbutz Kissoufim. Le tunnel n’était pas achevé, et personne n’a fait savoir quand il avait été repéré. Les batteries du système Dôme de fer ont été déployées pour répondre à tout tir de roquette.

Parmi les victimes, se trouvent notamment un commandant important du Djihad islamique palestinien, Arafat Abou Murshad, chargé de la région centre, et son adjoint. Deux membres du Hamas ont également péri.

Les tunnels d’attaque, un enjeu de sécurité important

Le Djihad islamique, qui dispose de la deuxième branche armée de la bande de Gaza (les brigades Al-Quds), a soutenu ces derniers mois la tentative de réconciliation entre le Hamas et le Fatah, la formation du président Mahmoud Abbas, à l’instigation de l’Egypte. Fondé à la fin des années 1970, dix ans avant le Hamas, il a toujours privilégié la lutte armée, se tenant à l’écart des élections palestiniennes. En mai, le Djihad islamique avait exprimé sa préoccupation lorsque, dans sa charte révisée, le Hamas semblait accepter l’idée d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967.

« Toutes nos options sont ouvertes, a déclaré lundi soir un haut responsable du Djihad islamique, Khaled al-Batash. Nous prendrons tout en considération, mais nous ne permettrons pas à l’ennemi de déterminer les règles d’engagement. » Dans un tweet sur son compte en anglais, le Hamas a accusé « les forces d’occupation » d’avoir utilisé du gaz toxique dans le tunnel, tandis que l’armée mettait en cause les émanations de poussière et de fumée, ainsi que les chutes de pierres, pour expliquer le nombre élevé de victimes.

Par communiqué, le Hamas a qualifié l’opération israélienne de « tentative désespérée pour saboter les efforts visant à restaurer l’unité palestinienne ». Les concertations étaient intenses entre factions, lundi soir, pour déterminer le degré de réaction, au-delà des communiqués outragés, tandis que l’Egypte essayait de préserver le fragile acquis de la réconciliation engagée.

L’armée assure que l’opération ne visait qu’à détruire le tunnel, et non à tuer des militants du Djihad islamique et du Hamas. Les tunnels d’attaque, dont 32 avaient été détruits par Israël au cours de l’opération Bordure protectrice à l’été 2014, demeurent un enjeu de sécurité important. Le gouvernement israélien a annoncé l’an passé l’édification d’une clôture dite « intelligente », sous et sur terre, pour détecter les travaux de construction de cette nature initiés dans la bande de Gaza.

Une réaction pondérée du Hamas

L’opération de lundi représente un test imposé aux factions armées, pour évaluer leur détermination et leurs nerfs. Elle intervient 72 heures après la tentative d’assassinat, d’origine inconnue, contre l’un des hauts responsables du Hamas, Tawfiq Abou Naïm, directeur général des forces de sécurité intérieures, et à la veille de la prise de contrôle prévue des points de passage vers Israël et l’Egypte par l’Autorité palestinienne (AP). Plus les étapes de la réconciliation s’approchent, et plus la tension risque de s’accroître.

D’ici le 1er décembre, l’AP est censée prendre la responsabilité de toutes les affaires civiles à Gaza. « Aujourd’hui, le Hamas n’est plus responsable des deux millions d’habitants, explique déjà Bassem Naïm, ancien ministre de la santé et cadre du mouvement. C’est l’AP qui a la charge des médecins, de l’électricité ou de l’éducation. S’ils veulent protester, les gens doivent se [re] tourner contre Abbas. » Le Hamas veut se concentrer sur l’unité palestinienne et la définition d’une stratégie politique commune entre toutes les factions, au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Cet ordre de priorité explique sa réaction plutôt pondérée, lundi, à la destruction du tunnel.