La ministre du travail Muriel Pénicaud, à gauche, lors des questions au gouvernement, le 8 novembre. / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

L’Assemblée a voté dans la nuit de mercredi 8 à jeudi 9 novembre le budget en baisse de la mission « Travail et emploi », la réduction du nombre de contrats aidés, fustigée par l’opposition pour sa « brutalité », suscitant de vifs débats.

La ministre du travail Muriel Pénicaud a défendu devant les députés un « budget de transformation » car « il rompt clairement avec une logique de traitement statistique du chômage », via « des choix assumés de réallocation de nos moyens », avec notamment un triplement des efforts sur la formation.

À périmètre constant, les crédits de la mission passent de 15,4 milliards d’euros en 2017 à 13,9 milliards, soit une diminution de 1,5 milliard. La baisse est essentiellement liée à la réduction du nombre de contrats aidés, qui passera en 2018 à 200 000, exclusivement dans le secteur non marchand, pour une enveloppe de 1,4 milliard d’euros. Il s’agit d’une baisse d’un milliard d’euros.

« Brutalité »

Comme en commission, l’opposition est montée au créneau sur cette diminution des emplois aidés, des élus de droite comme de gauche dénonçant la « brutalité » de la décision de leur réduction. « Je crois que vous vous trompez parce que vous avez tout simplement oublié que derrière ces emplois aidés, il y avait des hommes et des femmes » qui « parfois n’ont pas d’autre choix », a notamment déclaré Gilles Lurton (LR).

« Si vous étiez et de droite et de gauche, vous écouteriez à la fois ce que vous disent les Républicains et ceux qui sont à gauche de l’hémicycle. Malheureusement vous n’êtes ni à gauche, ni à droite, mais nulle part », a aussi lancé Olivier Faure, chef de file des élus Nouvelle Gauche. « S’envoyer à la figure que certains connaissent la réalité et que d’autre n’y connaissent rien, c’est juste pas très digne du débat national », a rétorqué la ministre.

Elle a notamment affirmé que le gouvernement voulait mettre de l’ordre « entre les contrats utiles » et ceux qui « sont justes un sujet de commodité » avec l’idée de ne pas « encourager de l’emploi précaire ». « Curieuse alliance du statu quo : surtout ne touchez à rien et surtout pas à ce qui n’a jamais marché », « curieuse alliance de la compassion de fabrique en instrumentalisant les emplois aidés alors que nous voulons tirer les bénéficiaires vers l’emploi durable », a aussi lancé Gilles Le Gendre (LREM).

« Budget inconsistent »

Globalement, le budget a fait l’objet de commentaires peu amènes de l’opposition. « Un budget c’est un peu l’inconscient d’une politique, en l’examinant on y trouve tous les fantasmes du pouvoir », et celui-ci « est à l’image de la société telle que vous la rêvez, une société coupée en deux avec d’un côté les gagnants, les premiers de cordée » et de l’autre ceux considérés comme les perdants, a affirmé Boris Vallaud (Nouvelle Gauche).

L’Insoumis Eric Coquerel a lui dénoncé la « deuxième mauvaise action politique après les ordonnances » estimant que « comme bilan d’un ministère du Travail en six mois, on a jamais fait pire », tandis que Pierre Dharréville (PCF) a mis en avant « l’un des budgets sacrifiés de ce projet de loi de finances ».

Pour LR, Gérard Cherpion a estimé qu’il était « loin d’être le budget de rupture nécessaire », tandis que le Constructif Francis Vercamer l’a jugé « trop en décalage avec la réalité de l’emploi vécue par nos concitoyens », indiquant que son groupe s’abstenait, là où les autres s’étaient positionnés contre.

Seuls deux amendements significatifs ont été adoptés, le premier créant une expérimentation des « emplois francs » en 2018, et le second, du MoDem, portant sur les maisons de l’emploi dont des élus ont dit craindre la « mort programmée ».

Il vise à leur allouer des crédits, sans changer l’enveloppe réduite de moitié par le projet de budget, mais en fonction de critères d’évaluation comme le respect des engagements. « Jamais on a rendu le parlement aussi inutile et décoratif que ce soir », a déploré Laurent Furst (LR), au vu du faible nombre d’amendements adoptés.