Des données sur une journaliste française ont été stockées illégalement par le renseignement militaire. C’est ce qu’a acté le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu mercredi 8 novembre. L’institution a enjoint à la ministre des armées et à la direction du renseignement militaire d’effacer ces données.

La journaliste Camille Polloni, qui travaille actuellement pour le média en ligne Les Jours sur les affaires liées à la justice et à la police, avait entamé des démarches en septembre 2011 pour récupérer les éventuelles informations la concernant dans les fichiers de police et de renseignement.

« Je voulais vérifier quel accès ont les Français aux fichiers de renseignement et (…) m’assurer qu’aucune surveillance n’a porté atteinte au secret de mes sources », a-t-elle expliqué à l’Agence France-Presse. « Il m’est arrivé trois ou quatre fois de surprendre une filature ou d’être prise en photo pendant un rendez-vous professionnel avec des personnes vraisemblablement surveillées. Ces épisodes ont-ils laissé une trace écrite quelque part ? Laquelle ? », s’interroge la journaliste dans un article sur l’affaire publié par Les Jours.

« On ne saura jamais ce que contiennent ces fichiers »

Après six ans de procédure, le Conseil d’Etat a finalement estimé que « des données concernant Mme Polloni figuraient illégalement dans les traitements d’informations nominatives » de la direction du renseignement militaire. « Par suite, il y a lieu d’ordonner l’effacement de ces données », a jugé la plus haute juridiction administrative. Par conséquent, Camille Polloni n’aura pas accès aux données comme elle le demandait.

Cette affaire a été examinée par une formation spécialisée du Conseil d’Etat, lors d’une audience à huis clos, couverte par le secret-défense. « Voici donc l’aboutissement de ma démarche, qu’on ne peut pas vraiment appeler une victoire », écrit la journaliste. « On ne saura donc jamais ce que contiennent ces fichiers, que ce soit des informations concernant la vie privée de Mme Polloni, ou des informations liées à sa profession », a critiqué l’avocat de la journaliste, Me Camille Mialot. « Le Conseil d’Etat lui-même fait en sorte que ces informations disparaissent », a-t-il déploré, qualifiant la décision d’« extrêmement décevante ».

La journaliste envisage désormais de déposer une plainte au pénal.