Un avion d'Air France transportant des proches des 133 touristes français victimes de l'accident d'avion de Charm-El-Cheikh, s'envole, le 07 janvier 2004 de l'aéroport d'Orly, à destination de la station balnéaire égyptienne. / JOEL SAGET / AFP

C’est une décision de justice qui intervient près de quatorze ans après les faits. Un non-lieu a été ordonné par le juge chargé de l’enquête en France sur le crash d’un Boeing 737 qui s’était abîmé en 2004 en mer, au large de Charm El-Cheikh (Egypte), faisant 148 morts dont 134 Français, a-t-on appris lundi 13 novembre auprès d’avocats des familles de victimes.

« Une ordonnance de non-lieu a été rendue le 11 juillet mais nous avons fait appel », a déclaré à l’Agence France-Presse l’avocat Jean-Pierre Bellecave, une information confirmée par son confrère Gérard Montigny et par le parquet de Bobigny.

Le juge a suivi les réquisitions du parquet, qui avait demandé un non-lieu en janvier 2016, estimant que l’enquête ne permettait « pas de retenir d’autre hypothèse que celle des fautes imputables à l’équipe de pilotage », décédée dans l’accident. Le parquet avait ainsi montré du doigt de « nombreux manquements », des « calculs approximatifs » et des « analyses sommaires entraînant de mauvaises décisions » de la part des pilotes.

Manque de coopération

Le 3 janvier 2004, l’appareil de la compagnie égyptienne à bas coût Flash Airlines s’était abîmé trois minutes après son décollage de la station balnéaire, à destination de Paris. L’enquête judiciaire pour « homicides involontaires » avait été ouverte le jour de la catastrophe. Elle avait donné lieu à 37 tomes de procédure, sans qu’aucune mise en examen ne soit prononcée.

Pour Me Bellecave, qui estime que l’enquête doit se poursuivre et qu’un procès doit avoir lieu, « il n’y a pas eu de mesure d’instruction contre les dirigeants en Egypte, alors qu’il était établi que cette compagnie avait commis un certain nombre de manquements ». L’avocat reproche à la justice d’avoir « laissé dormir le dossier ». Une action judiciaire est en cours au civil pour « mauvais fonctionnement du service public de la justice », a-t-il déclaré. Me Montigny, qui représente lui aussi l’association des victimes, estime de son côté que « les magistrats sont dans une situation de paralysie », « les Egyptiens n’ayant pas coopéré ».

En 2009, un rapport d’experts avait souligné l’insuffisance de la formation des pilotes et dénoncé les « manquements » de la compagnie. La formation du pilote n’aurait pas respecté les normes en vigueur et son « expérience précédente et sa courte formation en ligne ne permettaient pas un lâcher immédiat dans la fonction de commandant de bord », estimaient les quatre auteurs du document, dont un ingénieur en aéronautique. Les experts avaient aussi relevé la « fatigue » due au temps de service des deux pilotes lors des deux semaines précédant le crash.