Jean-Baptiste Rudelle, co-fondateur de Criteo, le 6 novembre 2015. / ERIC PIERMONT / AFP

Mais que va-t-il faire dans cette galère ? Jean-Baptiste Rudelle, le cofondateur de la « licorne » française Criteo, un des spécialistes mondiaux du reciblage publicitaire personnalisé sur Internet, se lance dans une nouvelle aventure : le covoiturage de courte distance, dit « court-voiturage ».

L’entrepreneur a créé Less, une start-up proposant la mise en relation entre conducteurs et voyageurs. Et il se donne les moyens. M. Rudelle a levé 16 millions d’euros auprès de fonds qui l’avaient déjà suivi dans l’aventure Criteo, comme Index Ventures ou Daphni et réunit une vingtaine de salariés, afin notamment de « développer les algorithmes robustes pour gérer de la cartographie en temps réel et organiser les rencontres entre utilisateurs ».

« Depuis plusieurs années, de nombreux projets ont vu le jour dans le transport de courte distance, mais personne ne domine encore ce marché du covoiturage urbain. A part Uber, l’un des seuls acteurs industriels du marché, les acteurs restent très modestes. Il y a de la place pour tenter de « craquer » enfin ce modèle », pense M. Rudelle.

Inventer un système adapté au grand public

Beaucoup s’y sont déjà cassé les dents. Qui se souvient encore de Sharette ou Wedrive, deux start-up gisant sur le champ de bataille du court-voiturage. Aujourd’hui, il existe une multitude d’entreprises qui tentent de percer ce marché. Dans la région capitale, Ile-de-France Mobilités a mis en place des partenariats avec 17 entreprises de covoiturage : Blablalines, Citygoo, Clem’, Covoit’ici/Ecov, HopWays, IDVroom, Kankaroo, Karos, MicroStop, OuiHop, Proxiigen, Rezo Pouce, Roulez malin/Covivo, Trajet à la carte, WayzUp, Wever, Zify…

Et aucun n’a réussi à tirer son épingle du jeu. Tant les mastodontes du secteur, comme Blablalines (lancé par Blablacar) ou IDVroom (SNCF), que les jeunes pousses, personne n’a vraiment trouvé le Graal pour rendre le covoiturage à la fois fluide, pratique et systématique pour le plus grand nombre. Quant à Waze (Google), il connaît quelques difficultés au démarrage. Après deux ans de test en Israël et maintenant en Californie, son offre ne semble pas encore s’envoler…

« Aux Etats-Unis, le seul endroit où le covoiturage fonctionne bien, note M. Rudelle, c’est autour du Bay Bridge. Les covoitureurs ont accès à une voie dédiée et ne paient du coup pas le péage. L’incitation est double. Ces conducteurs gagnent à la fois du temps et de l’argent. En ville, il faut trouver le bon équilibre et atteindre la masse critique suffisante pour rendre le système efficace. »

Dans un premier temps, l’application Less sera ouverte aux seuls conducteurs. « Nous l’ouvrirons ensuite aux passagers », indique M. Rudelle. D’ici là, la jeune pousse va devoir inventer un système adapté au grand public. D’autres ont déjà abandonné, à l’image de WayzUp et Karos, qui développent leurs services de covoiturage sur des zones ciblées, financées par des entreprises ou des collectivités locales partenaires, avant d’envisager un déploiement plus général.