L’église Saint-Remy et la rue principale, dans la commune de Les Voivres (88). / SKE/CC BY-SA 3.0

Les Voivres, 5 000 habitants, une commune rurale et forestière au sud-ouest d’Epinal. Des fermes, des bois, des vergers, un étang et ses pêcheurs. Et un maire à poigne, Michel Fournier, élu en 1989 (et constamment réélu depuis), qui ne compte pas laisser mourir son village. En 1990, déjà, alors que l’école menace de fermer faute d’un nombre suffisant d’élèves, il n’a pas hésité : un appel dans la presse a permis de faire venir cinq familles, logées dans des maisons rachetées et réhabilitées par la commune, et de sauver l’école.

« Le bois, principale ressource du secteur, n’était pas valorisé, et notamment le hêtre, qui partait pour la Chine »

Aujourd’hui, c’est une véritable petite filière autour du bois que Michel Fournier fait émerger dans la communauté de communes du Val de Vôge, dont il est président. Le coup d’envoi est donné lors de la création des pôles d’excellence rurale, à l’initiative de Nicolas Sarkozy. Il n’en faut pas plus pour que l’homme saute sur l’occasion : « Le bois, principale ressource du secteur, n’était pas valorisé, et notamment le hêtre, qui partait pour la Chine, raconte-t-il. Tout le monde s’est mis ensemble pour créer une filière économique et trouver des débouchés locaux pour le bois. »

Rejoint par de jeunes pousses

Le pôle d’excellence rurale Terre de Hêtre est né. A 25 kilomètres de là, à l’Enstib, l’Ecole nationale supérieure des technologies et industries du bois d’Epinal, cinq copains épris de sports outdoor – surf, ski, skate – ont le projet de monter leur entreprise pour « vivre de leur passion », en fabriquant notamment des longboards haut de gamme en bois de hêtre. Le lien se fait naturellement avec le pôle d’excellence.

« La communauté de communes avait le souhait de monter une couveuse d’entreprises, raconte Antoine Cochennec, l’un des fondateurs de ce qui est devenu In’bô. Nous avons été accueillis dans un ancien bâtiment industriel de 400 mètres carrés pour monter notre atelier, avec en plus une bourse de 500 euros par mois et par personne pendant trois ans. »

Une chance pour les cinq compères, qui peuvent aussi utiliser les machines de l’Enstib. La dynamique est lancée et très vite une gamme de lunettes en bois, puis de vélos en bambou, complète la production. L’année d’après, Les Voivres accueillent une deuxième entreprise : Il était un arbre, qui fabrique des maisons et des habitats insolites en bois, un marché en pleine expansion. A son tour, un fabricant de yourtes – en bois des Vosges, bien sûr – s’installe en 2012 mais cesse son activité en 2016. In’bô, entre-temps, s’est bien développée, notamment autour de la lunetterie – avec ses étuis en cuir réalisés à la Tannerie Sovos Grosjean, elle aussi située dans les Vosges.

« Tout n’a pas marché, mais on a créé une dynamique nouvelle dans le coin. Ça fait bouger les esprits »

L’entreprise compte, outre trois fondateurs – deux ont quitté l’aventure –, quatre salariés et de nombreux jeunes qui viennent finaliser leur formation, en stage. La communauté de communes, elle, n’a pas chômé non plus : oublié le bâtiment industriel des débuts, une ancienne ferme en pierre a été totalement réhabilitée pour créer une couveuse d’entreprises « à la pointe de la modernité », avec le projet d’accueillir cinq entreprises par an. La sélection des heureux élus est en cours. Mais Michel Fournier n’a pas dit son dernier mot. Il veut maintenant relancer l’agriculture, avec un projet de maraîchage en couveuse… « Tout n’a pas marché, mais on a créé une dynamique nouvelle dans le coin. Ça fait bouger les esprits », conclut-il.