Des centaines de milliers de Zimbabwéens ont manifesté samedi 18 novembre dans les rues d’Harare pour réclamer la démission du président Robert Mugabe. / Ben Curtis / AP

Le Zimbabwe a connu, samedi 18 novembre, l’une des plus grandes manifestations jamais organisées depuis l’indépendance et l’arrivée au pouvoir de Robert Mugabe, en 1980. Des dizaines de milliers de Zimbabwéens se sont rassemblés, dans une ambiance festive, pour exiger son départ de la présidence. « Un jour historique », a résumé samedi soir, avec une voix émue, la présentatrice du journal de la ZBC, la télévision d’Etat.

Au lendemain de cette mobilisation exceptionnelle, les pressions s’intensifient pour que M. Mugabe, âgé de 93 ans et déposé mercredi 15 novembre par l’armée, accepte de lui-même de quitter le pouvoir. La journée de dimanche s’annonce, à ce titre, cruciale, avec plusieurs rendez-vous importants : réunion du comité central du parti au pouvoir, nouvelle rencontre entre le président et l’état-major de l’armée.

Les vétérans de guerre appellent Mugabe à la démission…

Le chef de la puissante association des vétérans de la guerre d’indépendance exige que Mugabe quitte le pouvoir dimanche. « Il ferait mieux de renoncer (…). S’il ne le fait pas, l’armée doit en finir avec lui aujourd’hui », a déclaré Chris Mutsvangwa à la presse.

« Nous irons jusqu’au bout », a-t-il assuré, estimant que Robert Mugabe n’avait plus qu’à démissionner et à quitter le pays. « Il essaye de marchander pour s’en tirer dignement, mais il devra s’y faire », a-t-il ajouté auprès de Reuters.

… tout comme les jeunes de son parti

La ligue des jeunes du parti au pouvoir au Zimbabwe, le ZANU-PF, a également appelé dimanche le président à « démissionner ». L’influente ligue a aussi demandé « l’expulsion » de son épouse Grace du mouvement.

« Nous exigeons l’expulsion à tout jamais de Mme Mugabe de la ZANU-PF et exigeons du président Mugabe qu’il démissionne de son poste de président et premier secrétaire du parti et du poste de président de la République du Zimbabwe », a déclaré la ligue dans un communiqué.

Le comité central du parti au pouvoir en réunion extraordinaire

M. Mugabe, qui est le plus vieux chef d’Etat en exercice de la planète, est de plus en plus isolé. Après l’armée et les anciens combattants, neuf des dix sections régionales de la ZANU-PF l’ont à leur tour lâché, vendredi 17 novembre au soir, et ont demandé son départ.

Dimanche, le comité central du parti doit tenir une réunion extraordinaire, a annoncé Chris Mutsvangwa, le chef de file des anciens combattants. « Nous nous réunissons pour endosser les décisions des neuf provinces » du pays, a déclaré à l’AFP un haut responsable du parti sous couvert d’anonymat. Robert Mugabe pourrait donc être démis dans la journée de ses fonctions à la tête de la ZANU-PF et exclu du parti.

Suivez cette journée en direct avec notre journaliste Jean-Philippe Rémy, envoyé spécial au Zimbabwe.

Nouvel entretien avec l’armée

L’ex-vice-président Emmerson Mnangagwa, dont le limogeage, la semaine dernière, a précipité l’intervention de l’armée, pourrait être rétabli dans ses fonctions et Grace Mugabe, l’épouse du président, remplacée à la tête de la Ligue féminine du parti, selon M. Mutsvangwa. Par ailleurs, M. Mugabe a accepté de rencontrer, dimanche, l’état-major de l’armée, pour la deuxième fois depuis le début du coup de force militaire.

La stratégie de ceux qui ont pris le pouvoir, avec à leur tête Emmerson Mnangagwa, est la suivante : il fallait organiser cette grande manifestation qui montre que le pays soutient le processus en cours, puis réunir le comité central de la ZANU-PF afin qu’il demande à Mugabe de démissionner de son poste. Ensuite, une motion de censure est programmée mardi 21 novembre au Parlement pour le démettre de ses fonctions de président.